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Ecrivaine, membre de l’Académie française et auteure de L’Eglantine et le Muguet (Gallimard, 544 pages, 22,50 euros), Danièle Sallenave analyse les raisons du tournant identitaire d’une partie des intellectuels français, qui prend notamment sa source dans les dérives du combat antitotalitaire.

Assistons-nous à un tournant identitaire des intellectuels français ?

Danièle Sallenave : C’est indéniable. Par exemple, lorsqu’on lit dans le manifeste du « Printemps républicain » (mouvement issu de la gauche, fondé en mars 2016) l’éloge des notions de nation, d’universalité, de laïcité, on voit bien qu’elles sont convoquées pour une restauration, un combat, où du reste la figure de l’ennemi n’est pas nommée. Mais tout suggère que ce sont l’islam et les musulmans qui sont visés.

La laïcité ici évoquée n’a plus pour but, comme en 1880, dans une France encore sous régime concordataire, d’opposer au pouvoir spirituel et temporel de l’Eglise le principe de la souveraineté du peuple. Elle constitue plutôt l’un des fondements d’un cadre national devenu forteresse identitaire.

A travers ces prises de position récurrentes, on voit bien que le républicanisme identitaire a choisi sa version de la République, et que ce ne sera pas « la sociale ». Les habitants des quartiers ont retrouvé le rôle qu’on assignait au XIXe siècle aux « classes dangereuses ». Leur rassemblement en masse découpe dans la République autant de « territoires perdus ». La question sociale s’efface devant la question religieuse, l’islam étant réputé « insoluble dans la République ». (…)

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