L’enthousiasme des jeunes franco-maghrébins des quartiers populaires vis-à-vis du président turc irait grandissant, selon le sociologue Saïd Bouamama (…). «À leurs yeux, Erdogan c’est celui qui “tient tête à ceux qui nous font courber l’échine”. Paupérisée et précarisée, cette génération franco-maghrébine se sent isolée et diabolisée, jugée dans sa foi et constamment questionnée sur son droit à être française. Alors elle s’accroche au moindre élément de résistance: Erdogan en est le principal.»
De nombreux jeunes des cités vont en vacances «low cost» en Turquie. Ils y découvrent une société de consommation à la française, qu’ils apprécient, et en même temps la possibilité de vivre l’islam sans être tout le temps sommés de choisir. «Il y a le sentiment chez de nombreux jeunes franco-maghrébins qu’il leur est demandé de cesser d’être musulman pour être français, donc la Turquie apparait comme un modèle où citoyenneté et foi sont compatibles» confirme Saïd Bouamama.
Âgé de 37 ans, père de six enfants, le Franco-Marocain Mourad Ben Mahdi, qui se présentait aux législatives de 2017 sur la liste du Parti de l’égalité et de la justice (PEJ), une émanation française du Parti de la Justice et du développement (AKP, au pouvoir en Turquie) raconte que c’est un Turc qui lui aurait fait prendre conscience du poids des Français d’origine maghrébine : «Il m’a dit qu’on pourrait avoir autant de pouvoir que le lobby LGBT». (…)
«Cet élan [vers Erdogan] est plus opérationnel qu’idéologique, selon le statisticien français d’origine égyptienne, et ex porte-parole du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), Marwan Muhammad. Ce que ces jeunes admirent chez les Turcs et les Franco-Turcs, c’est leur capacité à se mobiliser, à se solidariser, et le fait qu’ils bossent sérieusement!»