En 2013 et 2014, les fouilles archéologiques menées à Marsal ont mis au jour huit squelettes, entassés dans un silo abandonné. Leur identité se précise. Il pourrait s’agir d’esclaves d’une tribu gauloise.
L’affaire commence comme un fait divers sordide. Le 23 août 2013, huit corps humains sont découverts dans un silo à grain désaffecté. Trois femmes, précipitées là les unes à la suite des autres, et par-dessus, quatre hommes et un petit enfant, jetés avec tout aussi peu de soins. L’examen des dépouilles laisse supposer des vies pleines de souffrances.
Que ces huit victimes aient vécu aux IVe et IIIe siècles avant notre ère n’a pas empêché l’ouverture d’une enquête sur les conditions de leur mort. Bien au contraire ! Depuis cette découverte réalisée par les archéologues qui ont mené des fouilles depuis 2007 à l’atelier saunier de « la digue » de Marsal, les scientifiques n’ont eu de cesse d’expliquer la présence de ces corps hors de toute tombe, abandonnés sans trace de rites funéraires.
Les positions dans lesquelles on les a retrouvés indiquent qu’ils ont été jetés là peu de temps après leur mort, comme de vulgaires déchets. Les dépouilles n’ont même pas été recouvertes. À l’époque pourtant, les défunts étaient veillés, puis enterrés dans une sépulture fermée, en compagnie d’objets destinés à les accompagner dans l’au-delà.
Redonner un visage aux intouchables
De la Floride à l’Allemagne en passant par Strasbourg et Montigny-le-Bretonneux, des analyses ont permis de redonner une identité, et même un visage, grâce à des reconstructions faciales à partir des crânes, à ces huit individus. Les trois femmes, mesurant chacune environ 1m50, étaient âgées respectivement de 22-25 ans, 35-45 ans et 45-65 ans. Les hommes, eux, étaient plus grands, entre 1m65 et 1m75. Ils avaient entre 30 et 45 ans. L’enfant n’avait pas plus de 6 ans.
L’ADN révèle que, contre toute attente, ils n’ont pas de liens familiaux. Trois d’entre eux souffraient d’une déformation pathologique des pieds, des fractures de la partie antérieure de l’os du talon qui ont pu être provoquées par le port répété de lourdes charges. Ils auraient également subi des traumatismes importants dus à des conditions de travail ou d’existence éprouvantes (graves entorses, fractures, arthrose…).
Les malheureux auraient appartenu à une classe sociale particulièrement défavorisée, à laquelle toute sépulture était refusée. Il se pourrait même qu’il s’agisse tout bonnement d’esclaves, asservis par des « nantis » tirant puissance et richesse de l’exploitation du sel. Voilà qui écorne sérieusement l’image bonhomme de nos ancêtres les Gaulois.
La présence de corps humains jetés ou déposés dans des silos est relativement rare mais pas exceptionnelle pour la période de l’âge du Fer. Plus de 140 cas sont attestés dans l’aire de la culture celtique. En France, ces « sépultures anormales » sont concentrées dans la plaine d’Alsace, en Champagne et dans le sud du Bassin parisien.
Source : Le Républicain lorrain
NB : L’image ci-dessous représente Ogmios, “dieu-lieur” qui “enchaîne” les hommes par sa parole. Un “ancêtre” de Saint Pierre-aux-Liens, fêté début Août.