Parti de rien, Alexandre Benalla est parvenu au cœur du pouvoir. Il est désormais un pestiféré pour ceux qui l’ont fait roitelet et disent ne pas le connaître. Bernard Quiriny fait son “éloge”.
Certes, il n’a rien de sympathique, ce M. Benalla, avec sa mine patibulaire, son goût de tabasser des manifestants sous l’œil d’une demi-douzaine de smartphones, sa manie d’usurper des accessoires de la police et la liste loufoque de ses privilèges en tout genre. Et pourtant, je ne puis m’empêcher de trouver qu’il y a chez lui quelque chose d’étonnant, voire d’admirable, qui justifie qu’on lance une fausse note dans le concert tonitruant de critiques qui s’abat sur lui depuis cinq jours. Car enfin, cet homme d’à peine 30 ans n’offre-t-il pas l’exemple presque inouï d’une ascension sociale fulgurante, d’une réussite professionnelle hors du commun, d’un parcours extraordinaire où se mélangent la chance (il a misé sur le bon cheval), l’habileté, l’entregent, l’intrigue et le toupet ? […]
Ce Benalla est un héros de roman, mi-Rastignac et mi-Vautrin. Je ne dis pas qu’il est défendable, je dis qu’il est fascinant. Encore qu’à la limite on peut le trouver plus défendable que les autorités qui se défaussent aujourd’hui dans un concours d’ignorance feinte et de virginité outragée. Benalla était partout, mais personne ne l’a connu ; il fréquentait les lieux de pouvoir, mais personne ne le remettait ; tout le monde lui serrait la pince sans savoir qui c’était. À entendre le ministre de l’Intérieur lundi devant la commission des Lois, Benalla serait en fait un émule de Claude Khazizian, ce retraité du PMU qui s’incrustait sur les photos officielles après avoir berné les services de sécurité. Le gars qu’on voit partout, mais qui n’a rien à faire là. Ça ne tient pas la route, et la presse a beau jeu d’ironiser sur cette ligne de défense.
En regard, les torts de Benalla ne pèsent peut-être pas si lourd. Le gars qu’on voit partout mais qui n’a rien à faire là n’est peut-être pas celui qu’on croit.