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Dans son livre “Indigène de la nation”, l’acteur et écrivain Slimane Dazi, revient sur sa vie menée entre deux rives. Un livre qu’il qualifie de “cri de colère, d’acte politique“. Cette histoire, c’est aussi un peu celle de tous les Français d’origine algérienne de sa génération, nés en France avant 1963 et l’indépendance de l’Algérie : une vie schizophrénique, kafkaïenne, pour ces êtres élevés, grandis et vivant en France, mais portant passeport algérien et se heurtant aux réticences politico-administratives pour obtenir leur nationalité française.

Dazi raconte avec colère et tristesse comment ce passeport algérien entrave ses déplacements professionnels ou d’agrément, comment l’état d’urgence a encore plus compliqué les choses, lui faisant louper des festivals, des invitations où il doit recevoir un prix, des répétitions pour une série américaine (Dawn, sur la préhistoire). Comme des milliers de Français suspectés en raison de leurs origines, Dazi n’a pourtant rien d’un danger potentiel pour la nation, lui qui est aussi un vrai titi parigot, un acteur remarquable et régulièrement sollicité, un bistronome émérite amateur de bonne graille et de bons flacons de petits propriétaires, exactement comme son personnage des Derniers Parisiens.

Si sa carrière de comédien et son problème de passeport sont les fils rouges du bouquin, Slimane Dazi raconte aussi avec simplicité et bonheur d’écriture (l’argot titi s’y épanouit) sa vie d’indigène de Paname, de Français aux racines plongeant dans l’Atlas oranais. Tout un monde, toute une époque défilent, des bidonvilles de Nanterre aux modestes pavillons banlieusards ouvriers, de la mixité ethnico-sociale qui fonctionnait bien dans les années soixante-dix (en tous cas, mieux que maintenant) aux vacances au bled et à la découverte du pays des darons, de sa langue, de ses paysages westerniens, de la difficulté d’assumer le fameux rôle de “grand frère” quand on est coincé entre une grande sœur brillante et un petit frère chouchouté à l’admiration des femmes qui commence par celle de sa propre mère, des mille petits boulots et combines jusqu’au métier de “ventouseur” – la ventouse est l’art de dénicher et réserver des lieux de tournage de film.

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