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Que pensez-vous du dénouement concernant les migrants de l’Aquarius ?

BERNARD KOUCHNER. Finalement, c’est en forçant les choses – bravo l’Aquarius – qu’on finit par se répartir les migrants. A partir de là, il faut vraiment que l’on parvienne à une entente européenne, avec un comité de répartition qui puisse opérer au plus près des départs. Evidemment, il faut faire repartir ceux qui viennent seulement pour chercher du travail, ça ce n’est pas possible. On dit qu’on va rétrécir les délais de traitement des dossiers, mais ce n’est pas vrai, on ne le fait pas !

Que doit faire l’Europe ?

BK : Il faut autre chose qu’un comité des ministres de l’Intérieur qui disent tous la même chose. Il faut un mécanisme spécifique et humain de répartition. La France est le pays des Droits de l’homme et combien a-t-on pris de migrants ? C’est une rigolade !

On n’a pas assez aidé l’Italie ?

BK : Oui, il ne faut pas que tout retombe sur le pays d’accueil comme le prévoit l’accord de Dublin. Il faut changer cela, car cela a amené quoi en Italie ? Un régime d’extrême-droite. On a engueulé les Italiens alors qu’ils avaient déjà vu passer 750 000 migrants. Et nous on n’a pas pris l’offre formidable de la Corse (NDLR : qui a proposé de recevoir des migrants) alors que cela nous aurait en plus permis d’améliorer nos relations avec les Corses.

Pourquoi Emmanuel Macron a-t-il refusé ?

BK : Je n’en sais rien, il ne peut pas tout faire. Mais il faut qu’on redevienne humain. Le nationalisme, ça se combat par la générosité, en allant convaincre les gens. Rappelez-vous les boat people, Jacques Chirac en a pris 300 000. Vous croyez que cela s’est vu ? Non. La France, ce n’est pas n’importe quoi, on a inventé l’humanitaire moderne. On a tout à gagner à être plus accueillant.

La France est-elle trop frileuse ?

BK : Elle est à la traîne alors qu’on veut être le patron de l’Europe ! La France doit être plus généreuse.

Vous ne croyez pas à l’argument souvent invoqué de l’appel d’air ?

BK : Non, de toute façon ils partent quand même. Il faut faire de la politique. Or, on n’en fait pas, on se conduit comme une entreprise de sécurité. Quand on voit le procès contre des gens qui aident des migrants qui sont pieds nus dans la neige en venant des cols d’Italie, quelle honte ! Quelle honte ! Moi, je devrais être en taule pour avoir fait entrer plusieurs milliers de réfugiés. J’ai compris que l’humanitaire, c’était de la politique, et que la politique ferait bien d’être un peu humanitaire.

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