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Ce mardi 23 octobre 2018, le polémiste Éric Zemmour a une nouvelle fois créé la polémique et enflammé les réseaux sociaux. Invité par BFM TV, il faisait face à l’historien Patrick Weil, directeur de recherche au CNRS, président de “Bibliothèque sans frontières” et auteur du livre “Le sens de la République” sur le plateau de Nathalie Levy dans l’émission “News et Compagnie”. Un bandeau prévient les téléspectateurs. Qu’on se le tienne pour dit, il s’agira de discuter les thèses d’un seul des deux invités : « Zemmour : sa défense de Pétain. » Très vite, Éric Zemmour disqualifie d’emblée le chercheur qui, bien heureusement, s’est expliqué : “Il n’y a pas de neutralité de l’historien. Vous êtes engagé politiquement, toute votre vie vous avez été à gauche, ce n’est pas une infamie mais il faut le dire aux gens.” Avant d’enchaîner plus tard dans l’émission : “Nous ne sommes plus dans l’immigration, certifie l’intéressé, nous avons une invasion et une colonisation (…) Le grand remplacement, il a déjà commencé, dans toutes nos banlieues. » Le tout non étayé, non chiffré, non prouvé, non argumenté.

Derrière ces échanges forcément controversés du fait des propos et de la présence même d’Éric Zemmour, se cachent des enjeux bien plus profonds qu’il n’y paraît sur la relation des chercheurs aux médias et leur rôle au sein de l’espace médiatique. Pour tenter de comprendre les dynamiques à l’oeuvre et revenir sur cette séquence, quatre chercheurs ont accepté d’analyser les tensions sous-jacentes tout en élargissant le propos à l’intervention des experts dans l’espace médiatique pour tenter de déconstruire les biais cognitifs en pleine action. Dans l’ordre alphabétique, il s’agit de :

  • Bruno Cautrès, politiste, chercheur CNRS au CEVIPOF, Centre de recherches politiques de Sciences Po, professeur à Sciences Po Paris.
  • Pierre Lefébure, maître de conférences en science politique à l’université Paris 13, chercheur au laboratoire Communication et politique (LCP-IRISSO, UMR 7170), spécialiste de communication politique, des comportements de participation et du rapport des citoyens aux médias.
  • Julien Longhi, professeur des universités en sciences du langage, à l’Université de Cergy-Pontoise (IUT de Cergy-Pontoise), centre de recherche AGORA, membre junior de l’institut universitaire de France promotion 2018. Spécialisé en analyse du discours et en sémantique, ses recherches portent sur les mécanismes de construction du sens dans les discours, en particulier politiques et médiatiques.
  • Claire Sécail, Docteure en histoire contemporaine, chercheuse CNRS (LCP-IRISSO). Ses recherches portent notamment sur les rapports entre médias et politique, la médiatisation des campagnes électorales et, en particulier, le rôle des meetings politiques compris à la fois comme dispositifs stratégiques de communication et espaces médiatiques à part entière.

(….) Le débat entre l’historien Patrick Weil et Eric Zemmour est la dernière illustration d’une impossibilité à « débattre » quand les interlocuteurs ne partagent pas le même régime de parole. Le régime de parole du premier, c’est la vérité du savoir et des connaissances scientifiques ; celui du second, c’est le domaine de l’opinion masquée derrière une pseudo-scientificité. Les historiens contemporains sont des animaux empiriques. Leurs travaux reposent avant tout sur le contact critique avec des archives. Leurs résultats et leurs raisonnements sont tributaires de ce matériau et leur pensée ne s’aventure généralement pas sur des considérations hors sol.

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