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Par Laurence Daziano, maître de conférences en économie à Sciences Po Paris, et membre du conseil scientifique de la Fondapol.

La croissance démographique du continent africain, souvent perçue comme une menace à travers les flux migratoires en Méditerranée, peut aussi être une opportunité économique pour l’Europe si le dividende démographique africain est exploité pour créer les conditions d’une croissance durable.

Le continent africain compte aujourd’hui environ 1 milliard d’habitants contre 670 millions en 2000. D’après les prévisions de la Banque africaine de développement, la population devrait atteindre 1,3 milliard de personnes en 2030 et 2,5 milliards de personnes, soit pratiquement 25 % de la population mondiale, en 2060. À cette date, le Nigeria comptera plus de 400 millions d’habitants, la RDC et l’Éthiopie près de 200 millions, la Tanzanie 150 millions, alors que le Kenya ou l’Angola avoisineront les 100 millions.

Cette croissance démographique résulte d’une baisse des taux de mortalité combinée à une baisse proportionnellement plus lente de la fécondité. Certes, la démographie africaine se caractérise par de nombreux contrastes régionaux. L’Afrique australe a déjà réalisé sa transition démographique avec des taux de fécondité inférieurs à trois enfants par femme. Inversement, plusieurs pays connaissent des taux supérieurs à six enfants par femme, à l’instar de la RDC, de la Somalie, du Niger et du Nigeria.

L’Afrique est également en voie d’urbanisation accélérée. La démographie constitue une immense opportunité de croissance, pour peu que le dividende démographique, qui a été à l’origine de la croissance chinoise des quinze dernières années, soit exploité à bon escient.

Le dividende démographique est un concept économique qui décrit l’avantage, par nature transitoire, dont dispose un pays en cours de transition démographique : durant une période suivant la baisse de la natalité, le pays présente une pyramide des âges très spécifique avec un nombre maximum de jeunes adultes en âge de travailler, et un nombre faible d’enfants et de personnes âgées. Cette situation démographique se traduit par une population active très productive et une grande capacité d’épargne, puisque les besoins pour les enfants et les parents sont relativement faibles.

Cela suppose que la population active soit formée afin de disposer des compétences nécessaires aux emplois offerts, et que les investissements étrangers soient présents pour apporter les capitaux indispensables au développement du secteur privé. Des investissements chinois, moyen-orientaux ou turcs sont actuellement réalisés en Afrique, à l’image de la présence massive de Pékin en Ethiopie qui investit dans l’industrialisation du pays, mais a également réalisé la ligne de chemin de fer entre Djibouti et Addis-Abeba.

Par ailleurs, la scolarisation dans l’enseignement supérieur s’est développée plus rapidement en Afrique subsaharienne que dans les autres régions du monde durant ces dernières années, alors que les innovations numériques, à l’instar du paiement par téléphone portable, sont un des grands vecteurs d’innovation au Kenya ou au Nigeria. De tout ceci, une conclusion émerge : si le développement africain n’est pas assuré, les conditions sont réunies pour que l’Afrique réalise enfin son décollage économique.

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