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Editorial du Monde du 12/11/2018 intitulé « Contre le nationalisme, un front fragile ».

Il y avait deux façons de marquer le centenaire de la Grande Guerre, une fois reconnues les graves imperfections de la paix conclue après l’Armistice. On pouvait célébrer une unité factice, saluer respectueusement la présence à Paris du président américain, leader du monde libre, suivant l’expression consacrée, et, avec le président russe, se féliciter que ces puissances ne soient pas en guerre les unes avec les autres. Ou bien l’on pouvait souligner les menaces qui mettent de nouveau cette paix en péril, rongent la démocratie et divisent le camp occidental.

Le président français a décidé que l’affirmation des valeurs qui sous-tendent les régimes démocratiques l’emporte désormais sur l’unité transatlantique, tant l’heure est grave. En déclarant, dans le discours qu’il a prononcé devant près de 80 chefs d’Etat et de gouvernement à l’Arc de triomphe, que «le patriotisme est l’exact contraire du nationalisme», en poussant l’opposition entre les deux concepts jusqu’à qualifier le nationalisme de «trahison du patriotisme», en fustigeant ces nationalistes qui disent « nos intérêts d’abord et qu’importe les autres ! », M. Macron s’adressait, certes, d’abord, à ceux de ses concitoyens qui sont tentés par cette idéologie. Mais le message visait tout aussi directement le président Donald Trump, assis au premier rang de la tribune des dirigeants, à quelques mètres de lui. […]

L’ombre au tableau est, hélas !, évidente : l’Europe est elle-même divisée, soumise aux mêmes courants nationalistes que celui qui a porté Donald Trump au pouvoir. Au sein de l’Union européenne, le nombre de gouvernements, soit dominés par des partis nationalistes, soit affaiblis par des coalitions fragiles, augmente. En comparaison, fort de ses pouvoirs présidentiels, de sa majorité au Parlement et de son mandat de cinq ans, M. Macron apparaît aujourd’hui comme le dirigeant le plus solide pour mener, contre le nationalisme, le combat du patriotisme, thème sans doute plus rassembleur que celui d’un « progressisme » mal défini. Encore faut-il que son assise nationale ne s’effrite pas inexorablement.

Le Monde

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