Lors de la cérémonie de célébration des 100 ans de l’armistice, à Paris, ce dimanche, Emmanuel Macron a opposé le nationalisme au patriotisme. Mais pour Gil Delannoi, tout n’est pas si simple : ce chercheur rappelle qu’il n’existe pas un, mais des nationalismes, et que celui d’aujourd’hui n’est pas celui des années 30.
[…]Emmanuel Macron a multiplié les références aux années 30 ces derniers jours. Là encore, la comparaison avec aujourd’hui est-elle valable ?
Le monde d’aujourd’hui est tellement différent de celui des années 30 ! L’économie s’est mondialisée, globalisée, l’Union européenne existe, de nouvelles tensions religieuses sont apparues.
On pourrait tout aussi bien comparer la période actuelle avec un bon nombre d’autres époques. Pourquoi pas les années 1900, par exemple? Ce genre de comparaison est largement contre-productif. Cela ne permet pas d’identifier les causes spécifiques de la poussée des nationalismes actuels, qui sont entre autres choses, un mouvement de défense économique et d’inquiétude ethnoculturelle. Le nationalisme des années 30 était, au contraire, un nationalisme de conquête et entraînait une compétition aux conséquences impérialistes. Le nationalisme contemporain veut protéger ses frontières, celui des années 30 les franchissait par la force et la guerre. […]
Le capitalisme contemporain s’est paré d’un vernis d’ouverture. Comme si l’ouverture des marchés était le seul véritable cosmopolitisme. Sans parler des dégâts écologiques et toxicologiques induits. Limiter les pires effets du commerce mondialisé n’est ni nationaliste, ni patriotique. Seuls ceux qui s’opposent à toute limitation ont intérêt à les qualifier ainsi. Il faut observer sérieusement et tâcher de comprendre précisément les causes et les effets des nationalismes contemporains, et les relier aux défaillances des sociétés dans lesquelles ils émergent. […]