François Bousquet voit dans la jacquerie des «gilets jaunes», et le mépris dont elle fait l’objet, le symptôme du déclassement de la France périphérique.
François Bousquet est journaliste et écrivain. Il participe à la revue Éléments. Il a publié notamment La droite buissonnière (éditions du Rocher, 2017), un essai sur l’influence de Patrick Buisson sur la droite française.
La France périphérique est si profonde que les éditorialistes donnent le sentiment de l’appréhender dans une perspective quasi-ethnologique.
Naguère signe extérieur de richesse, la voiture s’est ainsi transformée en moyen de déplacement des «ploucs émissaires», pour reprendre le bon mot de l’irremplaçable Philippe Muray.
Les gilets jaunes font l’objet d’un mépris de la part du pouvoir, et les récentes déclarations du président de la République, avec son timide mea culpa au 20 heures de TF1, n’y changeront rien. Depuis longtemps, cette France périphérique et ses habitants ont été immolés sur l’autel de la mondialisation. Ce sont les nouveaux «malgré-nous». Nulle sollicitude médiatique à leur encontre, à la différence des migrants. L’assignation à résidence est leur condition historique puisque la liberté de circulation a pris pour eux la forme d’une relégation territoriale dans le périurbain, la ruralité et les petites agglomérations. C’est une sédentarité subie. Où aller? Les centre-villes sont hors de prix et les banlieues hors-sol. […]
Mais qui sont donc ces Papous des hauts plateaux du Limousin, ces sans-culottes à bonnet rouge du Finistère, ces sans-dents à gilet jaune du Pas-de-Calais? On prenait leur résilience pour de la résignation si bien qu’on est presque surpris de les voir élever une protestation du fond de leur double détresse, culturelle et sociale. Quoi! Les gueux ont l’outrecuidance de se révolter . S’ils n’ont pas de pain, qu’ils mangent des brioches! S’ils n’ont pas de voitures, qu’ils roulent en Vélib’!. […]