Combien pèse un kilogramme ? 1.000 grammes ou 2,20462 livres. Mais d’où vient cette valeur et comment chacun peut-il être sûr d’utiliser la même mesure?
Depuis 1889, les pays membres de la Conférence générale des poids et mesures se sont mis d’accord pour utiliser un bloc de métal standard, conservé près de Paris, pour définir le kilogramme. Mais bien que le bloc moderne soit stocké dans un environnement hautement contrôlé, son poids peut légèrement varié car l’usure lui font perdre de la masse et la saleté, peut l’alourdir. Pour résoudre ce problème, les scientifiques du monde entier ont passé près de deux décennies à discuter de la manière dont le kilogramme pourrait être défini par rapport à des mesures constantes naturelles. Ils ont finalement pris une décision.
Le premier kilogramme (appelé à l’origine le grave) a été défini en 1793 par une commission de l’Académie française des sciences, qui souhaitait un meilleur standard que les quantités fixes de céréales utilisées traditionnellement. La commission a décidé que la nouvelle mesure serait la masse d’un décimètre cube d’eau distillée à 4°C (la température à laquelle l’eau a sa densité la plus élevée dans des conditions standard). Cela présentait l’avantage de permettre aux laboratoires les mieux équipés de reproduire cette norme. Par la suite, un prototype de cette masse a été coulé en laiton.
Malheureusement, cette définition de la masse dépend d’une autre mesure variable, le mètre. À cette époque, le mètre n’a été défini que provisoirement comme une partie de la distance du pôle Nord à l’équateur. Une fois que la valeur du mètre et la température de l’eau à sa plus haute densité ont été définies avec plus de précision, le kilogramme a également dû être remplacé. Et un nouveau prototype a été coulé en platine pour représenter cette masse.
Ce prototype a finalement été remplacé par le prototype international kilogramme (IKP) utilisé aujourd’hui, moulé dans un mélange de platine et d’iridium pour le rendre très dur et l’empêcher de réagir avec de l’oxygène. L’IPK et six autres exemplaires sont conservés par le Bureau international des poids et mesures dans le pavillon de Breteuil, à Saint-Cloud, près de Paris, pour servir de référence aux mesures. Des exemplaires de l’IPK sont acheminés dans le monde entier afin de garantir que tous les pays participants utilisent la même norme.
Mais même l’IPK moderne peut changer progressivement de masse. La réponse du Bureau international des poids et mesures a été de revoir les définitions du kilogramme, ainsi que toutes les autres unités de mesure de base utilisées en science (connues sous le nom d’unités SI pour système international).
Au lieu de mesurer le kilogramme par rapport à un bloc stocké dans un coffre-fort, nous pouvons le définir en fonction de valeurs précises : des constantes de la nature. Accepter une définition a pris du temps, car nous devions être en mesure de mesurer ces constantes à des normes précises avec une incertitude de 30 parties par milliard (ce qui signifie que les mesures sont précises à 0,00000003 unité près).
Les scientifiques l’ont déjà fait pour le temps et la longueur. Une seconde ne représente plus une fraction du temps nécessaire à la Terre pour tourner, ce qui peut changer lorsque le globe accélère ou ralentit. Au lieu de cela, une seconde est à présent définie par le temps nécessaire pour qu’une certaine quantité d’énergie soit libérée sous forme de rayonnement à partir d’atomes de césium 133. Spécifiquement, une seconde équivaut à 9 192 631 770 transitions dans les niveaux hyperfins du césium 133 à l’état fondamental. C’est le même, peu importe quand et où il est mesuré. […]
La création de la nouvelle définition a pris énormément de temps car les scientifiques ont dû créer des dispositifs très précis pour mesurer la constante de Planck avec un degré de précision suffisant. La méthode a également fait l’objet de controverses, car elle romprait le lien entre le kilogramme et d’autres unités SI de base, notamment la mole, qui mesure la quantité d’une substance en fonction du nombre de particules dont elle est composée. Certains scientifiques ont proposé des méthodes alternatives.
Suite à un vote symbolique, le Bureau international des poids et mesures et les instituts de mesure nationaux du monde entier utiliseront la nouvelle définition du kilogramme, ainsi que les nouvelles définitions des unités SI de base restantes, de la mole, du kelvin (température), l’ampère (courant) et le candela (intensité lumineuse).
Pour la plupart des gens, la vie quotidienne continuera comme d’habitude malgré les redéfinitions. Un sac de sucre standard contiendra autant de sucre qu’avant. Mais certains de ces changements, par exemple en Kelvin, apporteront des avantages pratiques aux scientifiques effectuant des mesures très précises. Et pour répondre à la question « Combien pèse un kilogramme ? », nous n’aurons plus à comparer des blocs de platine ni à nous soucier de les rayer.