“Gilets jaunes” : révolte “post-démocratique” ou spectre des “révolutions de couleur” ?
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Dans les analyses sur les « gilets jaunes », un détail a échappé aux observateurs autorisés : la couleur. Certes, le fait de choisir le gilet jaune de la part d’automobilistes en colère est naturel, mais c’est oublier que depuis des décennies, les « révolution 2.0 » visant à faire chavirer un gouvernement jugé illégitime ont toutes commencé par des manifestations « spontanées » réunies autour d’une couleur-étendard : révolution « orange » en Ukraine (2005-2014), « révolution des roses » en Géorgie (2008) « révolution Verte » en Iran (2009).
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Les « révolutions 2.0 » sont devenues le cauchemar de tout dirigeant lucide qui sait que son pouvoir est plus fragile et précaire que jamais, d’où l’appel des « gilets jaunes » à organiser leur « Acte III » aux cris de « Macron Démission ». Afin de prendre la mesure de la contestation que certains veulent transformer en « parti jaune », il est intéressant de faire un détour par l’Italie, où j’ai pu mesurer à quel point l’image du président Emmanuel Macron ressort ternie par l’action des « gilets jaunes » que l’on ne réduit pas, outre-Alpes, à une simple jacquerie d’ultra-droite.
La revanche de la province française modeste face à l’arrogance du « bobo land » jacobin
Le meilleur moyen d’avoir une idée à peu près réaliste d’une situation politique est de compléter les récits des médias nationaux – forcément orientés, que ce soit pro domo ou à charge – par des descriptions venues de sources extérieures, forcément moins influencées par les prismes hexagonaux. Pour le sujet qui nous occupe, il est amusant de voir comment ce qui est en partie présenté en France comme le fait de « populistes » ou de « l’ultra-droite » identitaire est perçu d’une manière fort différente en Italie, pourtant pays voisin et « cousin ».
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Dans le journal Il Libero, le 23 novembre, Giovanni Sallusti voit lui dans les manifestations des « gilets jaunes » une « révolution libertaire contre les taxes et l’idéologie verte (…) une révolte anti-jacobine face à un gouvernement qui réprime quiconque met en discussion le système de Macron, Merkel et des Moscovici (…) une révolte contre le « nouveau fondamentalisme, laïque et mondain, de l’écologisme d’Etat ».
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Le mouvement des « gilets jaunes » est présenté de l’autre côté des Alpes comme une sorte de « jacquerie transversale » mêlant poujadisme anti-taxe et révolte des provinciaux pauvres sur le modèle du parti antisystème italien « 5 étoiles » (aile gauche de la majorité « populiste » au pouvoir à Rome) bien plus que sur un modèle de « droite populiste » ou « d’ultra-droite ».
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