Tribune de Sylvain Boulouque, “spécialiste de l’extrême gauche”, sur les “Gilets jaunes” et la gauche.
” Par une curieuse cécité, la gauche s’est auto-persuadée que les ‘gilets jaunes’ portaient d’abord et avant tout une revendication sociale alors qu’elle était aussi nationale voir nationaliste. »
Dans son histoire du mouvement antifasciste allemand, “Antifa, histoire du mouvement antifasciste allemand” [coédition Libertalia et La horde, 2018], Bernd Langer rappelle un épisode oublié de l’histoire du Parti communiste allemand : la grève de la compagnie des transports berlinois en novembre 1932. Sur arrière fond de concurrence électorale pour les élections de Saxe, participèrent conjointement à cette grève le KPD (le parti communiste allemand) et le NSDAP (le parti national socialiste des travailleurs d’Allemagne, autrement dit le parti nazi). Certes le KPD remporta une petite victoire, mais celle-ci s’avéra être une victoire à la Pyrrhus avec la fin que l’on sait. […] Comparaison n’est pas raison. L’histoire ne repasse jamais les plats. […]
Une partie de la gauche s’est ralliée alors à la cause des “gilets jaunes” et tente de participer au mouvement pour en transformer sa nature, et faire passer la révolte antifiscale pour une révolte pour le pouvoir d’achat. Les scènes d’émeutes qui ont eu lieu sur les Champs-Elysées le 24 novembre sont explicites. Elles montrent clairement que l’extrême droite a commencé à provoquer les forces de l’ordre pour passer le barrage des Champs-Elysées, puis à animer les affrontements avec une partie des “gilets jaunes”, pour marcher sur l’Elysée. Une partie de la gauche radicale, faite de membres du “Black Block” et de la mouvance autonome, a, dans l’après-midi, participé activement à l’érection de barricades et à l’émeute. […]