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Camille Peugny est sociologue, professeur à l’université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines. Spécialiste du déclassement et des inégalités sociales, il travaille actuellement sur la polarisation de l’emploi en Europe. Pour lui, le mouvement des « gilets jaunes » signe un retour des clivages de classes.

Il est difficile de faire une sociologie en temps réel des individus et des groupes qui se mobilisent tant le mouvement est divers. Une chose est certaine : devant nos yeux explose le résultat de vingt ans de politiques néolibérales qui fracturent la société française, créent des nouveaux clivages et font à nouveau exploser les inégalités. Ce n’est pas nouveau : on observe depuis plusieurs années des conflits à bas bruit dans le monde du travail. Les « gilets jaunes » attirent autant l’attention car ils mettent en lumière un malaise beaucoup plus répandu et apparaissent comme incontrôlables. Ce qui est inquiétant, c’est qu’en face, on a des politiques dans l’impuissance, la méconnaissance, voire le mépris.

Pourquoi, selon vous, les revendications portent-elles en particulier sur le pouvoir d’achat ?

Parce qu’il a cessé de progresser depuis vingt ans pour beaucoup de nos concitoyens. Qui est aujourd’hui capable de se souvenir de la dernière mesure qui a créé du pouvoir d’achat ? Qui peut citer une seule victoire entraînant une amélioration des conditions de vie des salariés dans une période récente ? Il n’y en pas eu au XXIe siècle.

Les gouvernements successifs n’ont cessé de répéter qu’il n’y avait pas d’argent, et ont été incapables de s’attaquer aux privilèges de quelques-uns. […]

Le Monde

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