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Le débat en France sur l’opportunité d’introduire un référendum d’initiative populaire met la Suisse en lumière. Avec des analyses médiatiques et politiques qui frisent souvent le ridicule. Mais la Suisse, c’est quoi? Définition.

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Les médias et les responsables politiques français multiplient donc les références à la Suisse et à son système si particulier. Malheureusement, les regards portés sur ce petit pays de 8 millions d’habitants et son modèle politique font souvent l’objet d’analyses déficientes, caricaturales ou carrément fantaisistes.

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Vous l’aurez compris, la Suisse est fondamentalement basée sur une décentralisation des différents pouvoirs. En France, c’est la logique de la centralisation qui prévaut. Combien d’élus locaux se plaignent régulièrement de l’absence de vision de terrain des autorités parisiennes qui édictent des règles qu’elles croient justes à l’ensemble du pays, indifféremment des singularités régionales?

Mais ce n’est pas tout. La Suisse est aussi un pays qui a fait de l’éducation civique le cœur de son système politique. A tous les niveaux, les citoyens suisses sont appelés à participer. C’est ce que l’on appelle la milice. D’où la conscription obligatoire pour l’armée. Les hommes suisses, dès 18 ans, sont appelés à effectuer leur service militaire obligatoire, qui peut être réalisé aussi sous la forme de la protection civile ou du service civil sous conditions. Les citoyens peuvent également être convoqués lors des scrutins afin de participer à l’organisation dans les locaux de vote de leur commune respective.

D’ailleurs, la classe politique est essentiellement composée de miliciens, c’est-à-dire de personnes issues de la population sans disposition particulière, comme en France où une formation à l’ENA est un peu l’assurance de faire carrière dans l’administration et la politique. Bien sûr, on constate quand même une forte représentation dans les parlements et les exécutifs de personnalités issues de professions indépendantes, parce qu’elles disposent d’une plus grande flexibilité pour exercer leur mandat en parallèle de leurs obligations professionnelles. Car oui, en Suisse, seuls les membres d’un Exécutif font de la politique à temps plein. Même s’il existe des élus suisses qui cumulent différentes fonctions et sont donc des politiciens de carrière – principalement à gauche de l’échiquier politique d’ailleurs –, ce n’est pas la norme et c’est même plutôt mal vu. En Suisse, on apprécie beaucoup les gens qui savent servir et disparaître lorsqu’ils ont fait leur temps.

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Les Suisses votent très souvent, au minimum quatre fois par an, sur des sujets très variés. Les propositions de hausse d’impôts, par exemple, font l’objet de votations. L’achat d’avions de combat par l’armée suisse aussi. Une proposition qui a fait couler beaucoup d’encre à l’international visant à réduire l’intérêt pour les éleveurs de bêtes à cornes de pratiquer l’écornage a aussi fait l’objet d’un débat national. En fait, en Suisse, aucun sujet n’est tabou, et même s’il y a des discussions hautement intellectuelles sur les sujets qui méritent d’être débattus ou non, c’est au final les Suisses qui se déterminent. Même des personnes qui ne sont pas affiliées à des partis ont réussi à faire aboutir des initiatives fédérales (qui requièrent la récolte de 100’000 signatures valides dans un délai de 18 mois après le dépôt du texte à la Chancellerie fédérale). On précisera par ailleurs qu’une initiative qui modifie la Constitution fédérale est soumise à l’acceptation du peuple (majorité simple) et des cantons (une majorité de canton doit s’être prononcée en faveur du texte), mécanisme qui rend l’acceptation d’initiatives fédérales plutôt exceptionnelles.

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Bref, la Suisse dispose d’un système politique fantastique, loin d’être parfait cela dit, mais qui a le mérite de montrer que d’autres formes de gouvernance sont possibles, loin des clichés auxquels les médias et les responsables politiques français nous habituent depuis quelques jours. Est-ce pour autant la preuve que le référendum d’initiative populaire tel quel souhaité actuellement en France pourrait résoudre tous les problèmes de ce magnifique pays? J’en doute très sincèrement. C’est d’une réforme profonde dont les institutions françaises ont besoin, et cela passera inévitablement par la refonte de la Constitution française, ce qui actera la mort de la Ve République. Cette dernière est devenue anachronique, et je souhaite à nos voisins français que ces débats sur une démocratie plus participative les conduisent à réformer leurs institutions de façon à pouvoir appliquer des éléments de démocratie directe dans le fonctionnement de leur modèle politique.

L’Affranchi 

 

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