Le gouvernement saoudien a développé une application nommée «Absher» qui permet aux maris – mais aussi aux pères – de contrôler le déplacement des femmes et d’ainsi les empêcher de quitter le territoire.
Un pas en avant et deux pas en arrière. Le prince héritier Mohammed Ben Salman a beau chercher à transformer l’image ultra-conservatrice de l’Arabie saoudite, la place de la femme y est toujours aussi préoccupante, comme peuvent en attester les quelque mille femmes qui tentent de quitter le royaume chaque année. Elles peuvent certes désormais conduire, assister à des événements sportifs dans certains stades, créer leurs propres entreprises ou se produire en concert ; elles n’en restent pas moins sous la tutelle des hommes sur de nombreux aspects de leur vie quotidienne.
En effet, les Saoudiennes continuent d’avoir besoin de l’autorisation d’un tuteur (mari, père, frère) pour voyager ou même circuler librement. Le gouvernement a ainsi mis en place un système de surveillance sophistiqué qui prend la forme d’une application appelée «Absher», explique le site Business Insider relayé par Slate. Une application qui facilite les démarches de quelques taches administratives, comme le renouvellement du permis de conduire ou le paiement de certaines amendes, mais qui permet également de surveiller les femmes qui sont sous leur tutelle et les empêcher ainsi de quitter le territoire sans leur accord. Ces tuteurs décident donc d’accorder des sorties de territoires, selon les modalités qu’ils souhaitent. Une permission de voyager qu’ils peuvent révoquer en quelques clics.
Des notifications sont envoyées dès lors qu’une Saoudienne présente son passeport à la frontière ou à l’aéroport ; elle sera interdite de voyager si son tuteur en décide ainsi. Et bien sûr prestement sanctionnée pour avoir eu l’audace de tenter de fuir. Pour éviter d’être traquées, certaines femmes cherchent à subtiliser le téléphone de leur tuteur ou à modifier le mot de passe afin de s’accorder des autorisations de voyager, avec tous les risques que cela comporte.
Cette application, qui ne sert pas uniquement à contrôler le déplacement des femmes, serait disponible sur iOS en Arabie saoudite, selon une capture d’écran du site Insider. Mais son champ d’action s’arrête aux frontières du royaume. De nombreuses Saoudiennes, désireuses de quitter leur pays, profitent donc des vacances à l’étranger pour ne plus jamais revenir. Début janvier, la jeune Rahaf Mohammed al-Qunun s’était réfugiée en Thaïlande et avait refusé de retourner en Arabie saoudite. Elle a finalement obtenu l’asile politique au Canada et cherche désormais à attirer l’attention du monde sur la place des femmes en Arabie saoudite et à aider celles qui souhaiteraient partir.