L’entrepreneuse Mariame Tighanimine, qui a longtemps porté le voile, revient sur les polémiques récentes et dénonce l’hystérie collective sr le port du voile.
« Finalement, la France fait partie des seuls pays, avec l’Arabie saoudite ou l’Iran, qui se prononcent sur la manière dont les femmes doivent s’habiller.»
Aujourd’hui, Mariame Tighanimine explique avoir pris du recul sur le sujet. Elle a retiré son voile – pour des raisons personnelles – et enseigne au Centre pour l’entrepreneuriat à Sciences Po Paris. Elle travaille en parallèle sur le mouvement des Gilets jaunes, qui la passionne bien plus que les éternels débats sur le voile. […]
Lors de la polémique sur le voile de sport de Decathlon, vous avez tweeté votre soutien aux femmes voilées. Pourquoi avoir publié ce message si la crise des Gilets jaunes est bien plus importante ?
Parce que je lisais le témoignage de femmes voilées qui disaient : «On en a marre d’être les boucs émissaires.» Et puis on peut dire ce qu’on veut de Decathlon, il y a bien un besoin d’équipement pour le sport. Ce n’est pas une coquetterie d’un collectif de femmes voilées. Nike et d’autres marques l’ont fait. Mais c’est vrai que je me suis dit : ‘Pour une fois que, depuis des mois, on ne nous soûle pas avec des questions d’identité et de religion.‘ Aujourd’hui, la priorité des gens, c’est leurs fins de mois difficiles, les questions de démocratie. Les députés d’En marche !, on ne les a pas entendus pendant longtemps, et là, avec Decathlon, ils sont tous sortis du bois pour parler du voile. La France a un libéralisme à géométrie variable : quand on vend des armes à l’Arabie saoudite, ce n’est pas un problème, mais quand Decathlon propose un bout de foulard, ça gêne. Pourquoi en revient-on toujours à ça ? Quel est le but, à part abîmer le vivre ensemble et décentraliser le débat vers des choses inutiles ? Il y a un problème avec des esprits qui, dès qu’il s’agit de laïcité, deviennent malades. Je pense qu’il faut une thérapie collective à ce pays.