L’augmentation des droits d’inscription pour les étudiants étrangers hors Communauté européenne piétine nos valeurs et menace la francophonie, estime l’académicienne Barbara Cassin.
En France, on se soigne et on apprend gratuitement (ou presque) et très bien (ou presque), en tout cas plutôt mieux qu’ailleurs. Voilà de quoi les Gaulois sont heureux et fiers, qu’ils aient un gilet jaune, un col blanc, ou un stylo rouge. Notre identité, nos valeurs sont là, partagées, concrètes.
Je veux ici, très solennellement protester. Je veux faire entendre notre voix à nous, responsables et praticiens de l’enseignement, de la recherche, de l’éducation, de la culture. Pour dire que «Bienvenue en France», un dispositif au nom de contre-vérité, une infox qui ose se présenter comme un plan gouvernemental d’attractivité des étudiants internationaux, ne doit pas être mis en œuvre. Ni eu égard à ce que nous sommes, ni eu égard à la sacro-sainte économie. […]
Résultat, pour ne parler que francophonie : sur le même banc, on trouvera un Belge, un Suisse, un Canadien (il y a des accords qui en font des « Européens »), soit des « riches » qui paieront comme nos enfants. Et on trouvera – ou plutôt on ne trouvera plus ! – un Sénégalais, un Algérien, un Haïtien, qui devraient mais ne pourront pas payer les droits qui leur sont réclamés. […]
Les exclus sont ciblés : francophones d’Afrique, du Maghreb, intellectuellement formés mais sans fortune. Avec un discours redoutable qu’on ne peut pas ne pas lire en filigrane : pourquoi nos impôts à nous financeraient-ils les études de Noirs et d’Arabes ? […]