(…)
La première touche aux éléments sur la foi desquels Cesare Battisti a été jadis condamné: ce sont, pour l’essentiel, les témoignages d’un repenti, c’est-à-dire d’un criminel qui a troqué, à l’époque, sa propre impunité contre la dénonciation de ses éventuels complices – Cesare Battisti avait fui au Mexique, puis en France ; il n’était plus là, ni pour protester, ni pour se défendre, ni même pour être véritablement informé de ce qui lui arrivait; et le repenti, Pietro Mutti, lui a donc tranquillement mis sur le dos la totalité des crimes de l’organisation dont ils étaient les militants.
La deuxième touche à un point précis du mécanisme de la justice italienne et au fait que, contrairement à ce qui se passe dans votre pays ou dans le mien, les condamnés par contumace n’ont, s’ils sont rattrapés, pas droit à un nouveau procès où ils pourront réellement s’expliquer: en sorte que, si vous décidiez de laisser faire la procédure d’extradition, l’intéressé irait, sitôt rentré en Italie, droit à la case prison à vie (puisque telle est la peine, sans appel, qui fut prononcée lors du procès par contumace) et serait le seul condamné de cette sorte qui n’aurait jamais eu le loisir de rencontrer ses juges, de leur être physiquement confronté et de pouvoir répondre en personne, de visage à visage, des crimes qui lui sont imputés.
Et puis j’ajoute enfin ce «détail»: Cesare Battisti, que je suis spécialement venu rencontrer, il y a deux ans, dans sa prison de Brasilia, nie, et a toujours nié, les crimes en question; nombreux sont les juristes qui, après examen du dossier et au vu des mensonges très nombreux, et avérés, dont le repenti Mutti avait coutume d’émailler ses «confessions», estiment plausible, je dis bien plausible, son innocence; en sorte que vous courez aujourd’hui le risque de voir un homme dont le seul crime serait, dans cette hypothèse, d’avoir adhéré, dans sa jeunesse, aux funestes théories de la violence révolutionnaire finir ses jours en prison.
(…) La Régle du Jeu
A relire :
http://www.fdesouche.com/1181469-italie-cesare-battisti-reconnait-sa-responsabilite-dans-quatre-meurtres