Pour avoir participé à l’ONG Ibuka, qui chapeaute les associations de victimes du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994, l’homme s’est vu refuser la naturalisation
Dans l’assemblée qui comptait près de 300 personnes, dont Anne Hidalgo, maire de Paris, et Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances, il y eut, dimanche 7 avril, un moment d’effroi, puis un silence pesant.
Après avoir raconté avec émotion comment il avait survécu aux miliciens Interhamwe en 1994, le Rwandais Alain Ngirinshunti a exposé, au parc de Choisy (13e arrondissement de Paris), où étaient organisées une partie des commémorations parisiennes du génocide des Tutsi, survenu il y a vingt-cinq ans, les motifs qui avaient été invoqués en 2017 pour justifier son refus d’octroi de la nationalité française.
Âgé de 40 ans, le vice-président d’Ibuka, l’organisation qui chapeaute les associations de victimes du génocide, a lu la lettre qui lui avait été adressée par les services de l’immigration :
« Vous exercez des responsabilités associatives importantes au sein d’Ibuka France qui sert de relais aux services de renseignement rwandais… Par conséquent, eu égard à votre manque de loyalisme envers la France et ses institutions, il ne m’apparaît pas opportun de vous accorder la faveur d’une naturalisation. »
Deux jours avant cette cérémonie, une délégation des membres d’Ibuka, association reconnue d’utilité publique en 2014 et, selon ses statuts, « dont l’activité principale, à travers des témoignages, est de retracer, de conserver et de sensibiliser le public et les instances publiques au massacre des Tutsi », était reçue à l’Elysée par Emmanuel Macron.
Une journée de commémoration le 7 avril
Au terme de cette visite – une première dans les relations complexes qu’entretiennent la France et le Rwanda –, le président de la République avait annoncé la création d’une commission d’historiens et de chercheurs chargée de mener un travail de fond centré sur l’étude de toutes les archives concernant le Rwanda entre 1990 et 1994. M. Macron avait également annoncé que le 7 avril, date du début des massacres qui ont fait 800 000 morts, selon l’ONU, serait une journée de commémoration du génocide des Tutsi. (…)
« J’ai révélé au grand public les raisons du refus de ma naturalisation car je les trouve insultantes. Peut-on considérer les victimes d’un génocide comme des ennemis de la République ? Ce n’est pas mon cas personnel que j’ai souhaité exposer mais, à travers mon histoire, montrer comment les militants sont parfois perçus par une petite partie de la France. » (…)