L’Europe a forgé une monnaie qui ne s’incarne dans aucun personnage emblématique. « Le Point » lance une consultation avec RTL sur quinze propositions,parmi lesquelles Erasme, Victor Hugo, Richard Coudenhove-Kalergi, Jean Monnet ou Simone Veil…
Pour le philosophe allemand Peter Sloterdijk, il n’y a pas de raison particulière à donner aux Européens des figures qui incarnent cette Europe : toute incarnation pourrait basculer vers un enthousiasme collectif dangereux.
Le sommet de Copenhague, marqué par l’entrée des Britanniques, avait défini une « identité européenne » : démocratie parlementaire, Etat de droit, justice sociale, respect des droits de l’homme et amitié privilégiée avec les Etats-Unis.
Imaginons quelque espèce future débarquant dans plusieurs millénaires sur le territoire européen. Ne trouvant pour vestiges que nos billets en euros et leurs motifs, qu’en déduirait-elle ? Que ces Européens devaient être une peuplade toquée… d’architecture. Portiques, voûtes, ogives, colonnades, aqueducs, etc. Oui, ces Européens étaient à n’en pas douter des architectes monomaniaques. Mais à quoi ressemblaient-ils ? Quels étaient les visages de leurs héros ? [….]
Livrons-nous à un bref exercice de nostalgie monétaire. Un Pascal. Un Montesquieu. Un Delacroix… Les moins jeunes se souviennent des figures de notre panthéon qui veillaient, telles des divinités tutélaires, sur nos coupures de 500, 200 ou de 100 francs. C’était il y a plus de dix-huit ans, une éternité. L’argent, jamais tout à fait sale, avait une légère odeur de culture ou de génie français, était anobli par ces grands hommes. [….]
On ne se définit qu’en référence à l’autre. C’était quoi, l’Europe ? Jadis, c’était la chrétienté, mais cette définition n’était plus valable. Etait-ce l’Europe de la Renaissance et de l’humanisme ? Des Lumières, du libre examen ? Des valeurs de liberté et de démocratie portées par la Révolution française et les révolutions de 1848 ? L’Europe, était-ce le progrès, la science, comme le XIXe siècle en avait apporté la preuve ? [….]