Denis Valode, qui dirige le plus grand cabinet d’architecture privé de France, s’alarme du concours ouvert par l’État qui ne peut que nourrir la polémique. Il invoque la charte de Venise élaborée par l’Unesco dans les années 1970 et qui impose de restaurer les monuments à leur dernier état historique connu.
La reconstruction de Notre-Dame de Paris provoque une intense polémique. Qu’en pensez-vous ?
Je suis quelque peu révolté par ce débat. On mélange vraiment tout aujourd’hui. On invente une querelle entre les anciens et les modernes qui n’a pas lieu d’être et n’a aucun sens. Lorsque la pyramide du Louvre a été créée, elle le fut dans le cadre de la réorganisation d’un bâtiment, auquel il fallait trouver un nouveau fonctionnement et créer une entrée unique pour irriguer l’ensemble des salles. Imaginons un instant que le pavillon de Flore ait brûlé ? Eh bien, on l’aurait tout naturellement reconstitué à l’identique. […]
Etait-ce une bonne idée de lancer un concours international d’architecture avant de passer à l’action ?
Le problème de ce concours est qu’il va générer un assaut d’originalité dont les choix vont paraître contestables, très rapidement. L’État commet sans doute une erreur en renonçant à un bâtiment qui faisait l’unanimité, en lançant quelque chose qui amènera nécessairement une polémique. Les architectes qui se précipitent me font penser à des « naufrageurs ». Nous n’avons pas à jeter d’anathème sur telle ou telle époque. Notre-Dame a brûlé, nous n’avons pas su préserver ce patrimoine de neuf siècles, unique au monde. Pour perpétuer la sublime aventure de ces bâtisseurs de pierres, il faut restaurer cet ensemble afin de le transmettre aux générations futures. […]