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[…] A 70 ans, «BHL» s’est engagé dans une tournée de dingue. Jouer son propre rôle, c’est finalement ce qu’il réussit le mieux, comédien de sa propre histoire. Sur l’Europe, force est de constater qu’il se donne à plein : pour sa propre image ou celle de l’Europe ? Il rêve sans doute que les deux se rejoignent.

Du 6 mars au 22 mai, il joue seul en scène dans une vingtaine de capitales européennes, en français ou en anglais pendant une heure quarante, une pièce, Looking for Europe, qu’il a lui-même rédigée et qu’il adapte, la nuit précédant le spectacle, en fonction du pays où il se produit. […] Le pitch : la longue lamentation d’un écrivain qui, dans sa chambre d’hôtel à Sarajevo, doit préparer le discours qu’il prononcera deux heures plus tard lors d’une conférence de la dernière chance pour l’Europe. L’idée est d’en faire plus tard un film et un livre, «mélange d’oulipisme et de talmudisme», dit-il, ce qui fait un peu peur. […] Comment finance-t-il le tout ? «Des sponsors pour une part», dit-il. BHL cite les fondations Orange et Lagardère, le groupe Engie, les milliardaires Thomas Kaplan et François Pinault, se dit certain d’en oublier. […]

Le philosophe voit deux explications, politique et métaphysique, à la montée des populistes en Europe. Politique avec cet enracinement sur le Vieux Continent de l’extrême droite, voire du fascisme, qui refait surface à intervalles réguliers. Métaphysique car nous serions, selon lui, la première génération à vivre avec la certitude que la fin du monde peut devenir une réalité. […] Après un long plaidoyer – courageux – pour l’accueil des migrants, le revenu universel et… un ISF européen, BHL poursuit son monologue avec cette idée, qu’il entend pousser après le 26 mai, d’une «élection au suffrage universel direct d’un président des Etats-Unis d’Europe», histoire de donner enfin un visage au Vieux Continent, et termine l’exercice, trempé des pieds à la taille pour cause de chute dans la fameuse baignoire […], en appelant à la rescousse ses «bons fantômes» pour composer le futur gouvernement européen.

Sa pièce a d’ailleurs des airs d’apocalypse. Un long monologue souvent emphatique, mais avec quelques fulgurances sur «ce vent mauvais qui souffle sur l’Europe et cette bande de braillards que sont les populistes», cette Europe qui «s’est couchée devant Bachar al-Assad et Poutine comme elle s’est couchée devant [le Serbe] Milosevic». Devant le public tchèque, il déclame : «Comment le pays d’Alexander Dubcek et de Václav Havel, qui a su se libérer du joug du communisme, a-t-il pu se fermer et offrir une part de son destin à des hommes dont le message est : “l’Europe est une banlieue de Visegrád !”» Parfois il titube et l’on ne sait plus quelle est la part de la fiction et de la réalité. Il en appelle aux amphétamines («Captagon ! Maxiton ! Corydrane ! Trinité grandiose ! Triangle lumineux ! J’aurais un Captagon, là, sous la main, ou un Maxiton […], je leur redessinerais l’Europe en deux coups de cuillère à pot»). […]

Libération

Merci à Berzerker

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