Voyager en « Greyhound » à travers les États-Unis a longtemps fait partie d’un certain « mythe américain ». Emprunter un de ces bus à bas prix qui sillonnent le pays était la garantie de côtoyer une population en marge du système : “originaux”, étudiants fauchés retournant au bercail, ou encore individus décidant de tout plaquer pour tenter leur vie ailleurs…
Les bus Greyhound sont désormais devenus le symbole de la nouvelle immigration sud-américaine : chaque jour plus de 5 000 personnes en provenance du Guatemala, du Honduras et du Salvador les empruntent à partir des villes frontalières du Mexique.
Les vœux du président Trump d’envoyer ces migrants dans les villes « sanctuaires » démocrates qui s’opposent à sa politique d’immigration (San Francisco, Boston…) semblent vains : des milliers de migrants arrivent chaque jour par bus dans toutes les villes du pays, rejoignant ainsi les membres de leur famille ayant déjà accompli le voyage.
Rob Friedman, directeur commercial de Greyhound, a reconnu dans une interview que les ventes sur les marchés des migrants au Texas et en Arizona avaient considérablement augmenté au cours de la dernière année.
La station Greyhound à Dallas, le siège de la société, a été transformée par défaut en un refuge temporaire pour migrants, à l’image d’autres gares routières de villes du sud-ouest. «Parfois, c’est presque comme si nous étions des étrangers», déclare Don Shockley, 77 ans, 4 millions de kilomètres à son actif, observant les passagers montant dans son bus. «Je pense que nous devons construire un mur. Ça ne les empêchera pas tous, mais ça en gardera quelques-uns. Jusqu’ici, ces migrants se rendaient principalement en Californie et au Texas. Désormais, ils se rendent partout dans le pays».
Destinations des 7512 migrants enregistrés l’an passé au refuge social Casa Alitas à Tucson, AZ
Les 54 sièges sont occupés, dont 33 par des migrants, se rendant dans tout le pays. Parmi eux, trois frères Guatémaltèques se rendent dans le Maryland pour remplacer leur père de 60 ans, un sans-papiers qui travaille aux USA depuis 15 ans et envoie de l’argent à sa famille au Guatemala.
« C’est notre tour. Papa vieillit. Il veut rentrer à la maison et être avec maman. Chaque frère voyage avec un enfant, notre billet pour l’Amérique», faisant référence aux lois sur l’immigration qui permettent d’éviter la détention si les migrants arrivent avec un enfant.