PALERME, Italie – Dans un pays qui lutte depuis des décennies pour affaiblir sa mafia locale, un groupe criminel étranger se renforce.
Les membres du groupe sont nigérians. Ils détiennent des territoires au nord à Turin jusqu’au sud à Palerme. Ils font du trafic de drogue et du proxénétisme, nombre de migrantes deviennent prostituées. Ils recrutent de nouveaux membres dans les centres d’accueil pour demandeurs d’asile.
Les enquêteurs et des magistrats affirment que la mafia nigériane, comme on l’appelle ici, a capitalisé sur une vague d’immigration historique qui dure depuis plusieurs années. (…) Alors que la politique italienne se tourne vers la droite populiste, le pays est confronté non seulement à une mafia étrangère, mais aussi à une question qui divise le pays : Les craintes de longue date en matière d’immigration se concrétisent-elles ?
Pour les dirigeants élus à la tête du gouvernement italien en s’engageant à mettre fin à “l’invasion”, la mafia nigériane contribue à justifier la politique de fermeture mise en place l’année dernière. L’homme politique italien le plus en vue, Matteo Salvini, a récemment utilisé Twitter pour évoquer une affaire criminelle mettant en cause la mafia nigériane, écrivant que les chefs criminels “africains” représentaient “une menace croissante qui doit être éradiquée immédiatement”.
(…) Dans un discours prononcé en avril, le pape François – dont les plaidoyers en faveur de l’immigration vont à l’encontre de la position du gouvernement italien – a fait valoir que les délinquants peuvent se trouver partout et que la mafia est avant tout une spécificité italienne.
“Ce ne sont pas les Nigérians qui ont inventé la mafia”, dit le pape Francois.
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La Sicile d’aujourd’hui est différente. La Cosa Nostra est affaiblie. Ses dirigeants ont été emprisonnés l’un après l’autre. Le groupe est devenu plus calme, moins ouvertement violent et, au cours de la dernière décennie, une nouvelle vague de personnes est arrivée – des centaines de milliers d’Africains, arrivant en Sicile, la porte d’entrée de facto des migrants en Italie jusqu’à la fermeture des ports par Salvini l’année dernière. De nombreux migrants sont partis s’installer dans d’autres régions d’Italie, voire en Europe. Mais certains sont restés.
Les enquêteurs disent qu’ils ont vu les premiers signes de la présence d’une mafia nigériane en 2013 avec une recrudescence des agressions violentes.
(…) La mafia nigériane a bâti une grande partie de ses activités sur la seule chose à laquelle Cosa Nostra ne s’est jamais intéressée : la prostitution.
Certains experts affirment que jusqu’à 20 000 femmes nigérianes, dont certaines sont mineures, sont arrivées en Sicile entre 2016 et 2018.