26/08/19
En plus des suppressions de postes, l’État réfléchit à confier la gestion des forêts communales à des prestataires privés et à supprimer la consultation de l’ONF en cas de défrichement… Or, selon les travailleurs forestiers, une gestion durable de la forêt dépend du maintien d’un service public forestier fort.
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L’ONF vit peut-être ses dernières heures. Un rapport interministériel doit être publié sous peu. Il présentera différentes pistes d’avenir pour le service public de la forêt dont une remise en cause de l’existence même de l’ONF. « Le dossier est explosif, rapporte un syndicaliste. On ne sait pas à quelle sauce on va être mangé. Le rapport devait être remis au gouvernement le 28 février 2019 et il n’a toujours pas été rendu public. Le gouvernement attend sûrement l’été pour le publier. Quand tout le monde sera en vacances… » Interrogé par Reporterre sur ce sujet, le ministère de la Transition écologique n’a pas répondu.
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À l’origine de cette bataille pour la gestion des forêts communales, on retrouve aussi une critique de la politique actuelle de l’ONF. Selon Michel Benard, syndicaliste à la CGT Forêt, « l’Office national des forêts cherche à maximiser les profits. Il coupe de plus en plus de bois et délaisse la petite économie locale. Il se comporte comme une entreprise privée qui doit dégager des bénéfices ». Un ver est déjà dans le fruit. « La privatisation s’est distillée dans nos métiers. Nous avons été contaminés par les logiques productivistes et entrepreneuriales, poursuit M. Bénard. Il ne s’agit pas de défendre en soi l’ONF mais un véritable service public qui réponde aux attentes de la société ».
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Autre inquiétude : le projet de décret (en consultation publique) sur la simplification des autorisations administratives. Il envisage de supprimer la consultation de l’ONF pour des opérations de déboisement dans les forêts publiques. « Dorénavant, pour décider d’autoriser ou non la transformation d’une forêt en zone commerciale, en lotissement ou en champ de blé, l’État se passera de notre avis », s’inquiète le Snupfen. Pourtant, qui connaît mieux ces forêts que nous le service public qui les protège et les gère depuis des siècles ? »
Même si l’avis de l’ONF restait consultatif, il a pu, à plusieurs reprises, bloquer ou modifier des projets d’aménagement comme des carrières, des pistes de ski et des barrages. À Bure (Meuse), l’ONF avait aussi émis des réserves sur le défrichement du bois Lejuc qui doit accueillir un site d’enfouissement de déchets nucléaires.
En voulant simplifier les procédures administratives, ce décret ouvre donc la voie aux bétonneurs et pourrait selon les syndicalistes toucher plusieurs milliers d’hectares par an. « Il va dans le sens du défrichage à tout va et de l’absence de gestion durable de la forêt », admet de son côté Guillaume Tumerelle, avocat et professeur de droit forestier. « Ce gouvernement n’est pas cohérent entre ses paroles et ses actes, ajoute Adeline Favrel, de France nature environnement. Alors qu’il dit vouloir protéger les écosystèmes naturels, il prend des mesures pour faciliter le changement d’usage des sols qui a été reconnu comme la première cause de disparition de la biodiversité. »
Malgré nos demandes répétées, ni la direction de l’ONF ni le ministère de la Transition écologique n’ont répondu à nos questions.