Depuis Jacques Chirac, qui se vivait en incarnation du barrage au Front national, tous les chefs de l’Etat ont tenté de chasser sur les terres du FN, devenu RN. Avec des résultats contestables selon Libération.
[…] C’est exactement la stratégie appliquée par Jacques Chirac en 1991, avec sa saillie sur «le bruit et l’odeur» des familles d’immigrés. Celui qui est maire de Paris et président du RPR justifiera la formule, choquante, a posteriori : «Je ne suis pas suspect de sympathie à l’égard de Le Pen. Je ne vois pas en quoi il aurait le monopole de souligner les vrais problèmes.» […]
L’idée de Macron est certes un peu différente, puisqu’il cherche aussi à faire de son parti et du RN, les deux forces principales du pays. «Ce qui revient à aussitôt tendre le micro à Le Pen, mais aussi à n’avoir qu’un seul adversaire», analyse Fourquet. […]
Pour le politologue Jean-Yves Camus, débattre de l’immigration est légitime surtout si on le fait de manière républicaine et apaisée «mais les électeurs qui sont sensibles à ces questions ne veulent pas d’une réflexion sur l’immigration : ils veulent une immigration zéro au minimum, une inversion des flux migratoires au mieux». «Prendre l’immigration comme un sujet, cela a un sens, abonde Vincent Tiberj. Le seul problème pour Macron, c’est que les gens qui sont susceptibles de voter pour lui sont a priori plutôt pour le multiculturalisme. Son calcul est mauvais parce que stratégiquement, l’immigration est un des derniers marqueurs de gauche. En faisant ça, il se coupe du vote de gauche, et en même temps valide des thèses d’extrême droite. » La preuve ? Contrairement à 2002, l’accession de la présidente du FN au second tour de la présidentielle en 2017 n’a provoqué aucune manifestation d’envergure. A force de parler comme l’extrême droite, on aurait donc oublié de la combattre ?