Depuis deux ans, le nom de Falmarès fleurit dans le Morbihan, de médiathèques en librairies. Mais les éditeurs du “réfugié poétique” tremblent : ses 18 ans condamneront-ils sa plume à un nouvel exil ?
“Voici des lunes et des lunes qui passent, Me voilà, là ! Réveillé mille fois, Dans le ventre de ma chère et belle Bretagne, Et je me souviens, je me souviens…” Dans quelques jours, les éditions Les Mandarines publieront ces vers dans “Soulagements 2”, le nouveau recueil de poésie du jeune Guinéen Falmarès.
Spécialisés dans le théâtre, Joëlle et Armel Mandart ont fait un pas vers la poésie après avoir entendu le poète adolescent déclamer sur le port du Bono en juin 2018. Ils ne sont pas les seuls à avoir été conquis. Chiffre exceptionnel pour cet art, le premier livre a été diffusé à 700 exemplaires. Et le “réfugié poétique” a porté à la fois ses mots et son témoignage de migrant de Belle-Ile à Pontivy, de lycées en lieux artistiques.
Mais en décembre, deux convocations en préfecture, la veille et lendemain de son anniversaire, fissurent cette reconstruction par la plume. Aux fatidiques 18 ans, l’épée de Damoclès d’une expulsion a été son cadeau : “La préfecture me demande un passeport guinéen”. Une formalité impossible à accomplir pour le jeune homme qui a fui son pays. Autour de lui, chacun se mobilise, alors qu’un compte à rebours de six mois est lancé. “Je suis dans l’attente”, résume-t-il pudiquement. (…)
“On naturalise bien les footballeurs, pourquoi pas les poètes ?” plaide Joëlle Mandart, qui veut croire que la sensibilité poignante de Falmarès, ses associations jubilatoires et son invitation à l’émerveillement seront des preuves suffisantes de sa “phénoménale intégration”.