Les journalistes aiment à se voir comme de courageux combattants qui bravent le courant dominant. Malheureusement, les chiffres suggèrent l’inverse. La plupart des médias opèrent dans un environnement dans lequel presque tout le monde pense de la même manière qu’eux
[…]De la “radio rouge” à la “radio verte”
[…] Un correspondant du “Neue Zürcher Zeitung” s’est récemment lancé dans une introspection. Sa conclusion: dans le passé, les conservateurs auraient qualifié les institutions de service public de “radio rouge”, aujourd’hui il faudrait plutôt parler de “radio verte”.[…]
Les journalistes de gauche n’apprécient pas d’être étiquetés comme tels, j’en ai fait l’expérience à plusieurs reprises. Je pense que cela a à voir avec l’image de soi. Les journalistes se plaisent à penser qu’ils sont de courageux combattants qui bravent le courant dominant. Si vous affirmez qu’ils évoluent dans un environnement où la plupart des gens pensent comme eux-mêmes le font, cela réduit quelque peu l’idée d’héroïsme. Qui apprécie d’être considéré comme un suiveur?
[…] Il y a peu d’études sur les préférences politiques des médias. L’une des plus grandes enquêtes date de 2005 et provient de l’Institut de Hambourg pour le journalisme. La sensibilité politique des journalistes avait alors été établie comme telle: Verts 35,5%, SPD 26%, CDU 8,7%, FDP 6,3%, autres 4%, aucun parti 19,6%.Des études récentes arrivent à une conclusion similaire. Parfois, le nombre de ceux qui se déclarent «sans étiquette» est plus élevé. Parfois, les chiffres en faveur des sociaux-démocrates sont meilleurs, parfois ils sont pires. Mais la tendance générale demeure inchangée: si les journalistes allemands pouvaient imposer le chancelier fédéral, il ne serait pas issu du camp conservateur.
Même dans les rédactions dont on pourrait penser que c’est l’inverse, il y a une nette majorité pour les Rouges-Verts. Au «Welt», le vaisseau amiral conservateur du groupe Springer, c’est un fait connu depuis que l’équipe éditoriale a mené une élection «test» entre collègues à l’occasion d’une élection fédérale il y a quelques années.
Les commentateurs issus des médias de gauche aiment à souligner que les rédacteurs en chef sont souvent beaucoup plus conservateurs que les membres de leurs équipes. C’est peut-être exact, mais cela a moins d’impact dans le travail éditorial quotidien que ce à quoi l’on pourrait s’attendre (ou à ce que le rédacteur en chef imagine). Il existe de nombreuses manières de contourner les instructions qui viennent d’en haut – je parle par expérience. Les sujets proposés sont ignorés, ou le rédacteur en chef apprend malheureusement qu’aucune preuve ne vient étayer sa thèse.
Pourquoi tant d’embauches de journalistes de gauche?
L’une des raisons est ce que la sociologie appelle « le biais de sélection ». Le journaliste « type » a étudié l’allemand, l’histoire ou la politique. […]
Pourquoi les chercheurs en sciences humaines se trouvent-ils tellement à gauche de l’échiquier politique? Les personnes concernées diraient probablement qu’elles accordent beaucoup d’importance à la justice. Ma réponse serait plutôt de prétendre qu’il s’agit d’une sorte de loi de compensation.
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(Merci à TraductriceTradi)