Les deux vigiles qui gardent l’entrée du principal bureau de poste de Saint-Denis sont découragés. Costaud, Pierre tente d’imposer un mètre de distance entre les clients. Impossible. La queue traverse la rue. Des grappes d’hommes discutent. La rue de la République, artère principale du centre de Saint-Denis, affiche pourtant une litanie de devantures fermées. La place de la Mairie, qui est aussi celle de la Basilique des rois de France, est en revanche quasi déserte. Mais à la hauteur de la Poste, rien ne va plus.
A l’intérieur d’un bar-tabac, huit gaillards discutent et demandent un café que, devant nous, le patron n’ose pas servir. Catherine, vendeuse dans la pharmacie voisine, râle derrière son masque de couleur bleue. Juste avant, quatre clients sont arrivés ensemble et ont bloqué, en parlant bruyamment, l’entrée de son officine. Là aussi, le vigile de service est désolé. «Ils ne comprennent rien. Certains disent même que ce virus, c’est une fable de Blancs pour les obliger à déserter la rue», s’énerve le gardien. Bonne nouvelle: cette pharmacie vend du gel hydroalcoolique et de l’alcool désinfectant. Mauvaise nouvelle: les «mesures barrières» préconisées par le gouvernement français sont ignorées de la population: «Moi-même, j’ai peur explique Catherine. J’ai repris le travail ce matin. Je ne m’attendais pas à ça…»