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Les mobilisations suscitées par la mort de George Floyd aux Etats-Unis et à travers le monde ont redonné vie à une revendication ancienne : débarrasser l’espace public des statues de marchands d’esclaves, généraux confédérés, dignitaires coloniaux… Pour Renaud Hourcade, politiste, chargé de recherches au CNRS, Laboratoire Arènes–Université de Rennes, il est temps de mettre nos symboles en phase avec les valeurs et les identités contemporaines, de s’attaquer au racisme dans toutes ses expressions, même les mieux ancrées dans le paysage urbain.

[…] Il s’agit bien de lutter contre le racisme, et non pas de réécrire l’histoire ou de contester la République en s’attaquant à ses symboles. […]

A qui ces identités parlent-elles encore ? En quoi la République souffrirait-elle de mettre à jour de tels symboles ? L’idéologie républicaine n’immunise en rien contre le racisme institutionnel, les discriminations, les violences policières qui s’abattent sur les minorités. Elle tend plutôt à les dissimuler derrière le masque commode de l’universalisme ou de l’anti-communautarisme. La présence dans l’espace public de symboles d’un Etat esclavagiste et colonial y ajoute une autre oppression : la discrimination mémorielle. […]

Il serait grand temps, pourtant, de mettre les symboles de l’espace public en phase avec les valeurs morales et les identités contemporaines. De prêter attention à nos concitoyens qui se sentent insultés dans leur histoire, leur sensibilité et plus encore dans leur appartenance à la nation. De comprendre avec eux la nécessité de s’attaquer au racisme dans toutes ses expressions, même les mieux ancrées dans le paysage urbain. On aurait tort de s’abriter derrière l’histoire pour justifier de conserver ces symboles. Il ne s’agit pas d’histoire mais de mémoire, donc d’identités collectives. Faire tenir debout ces statues est en réalité un geste politique, même s’il s’ignore : c’est faire vivre des valeurs du passé.

Libération

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