Pour Pierre Tevanian, philosophe et enseignant en Seine-Saint-Denis, les déboulonnages de statues d’esclavagistes sont des actions «légitimes et salutaires, tant au nom de l’histoire qu’au nom de la mémoire».
Les actions de déboulonnage qui défraient la chronique ont suscité une inflation de condamnations hyperboliques à droite, aussi bien, de manière prévisible, dans la droite lepéniste que, de manière plus inquiétante, dans la droite dite républicaine ou celle dite centriste du président Macron. Tout aussi inquiétant, à mon sens, est le relatif silence des partis de gauche, ou la faiblesse de leur soutien. […]
On ne vandalise pas gratuitement, ni de gaîté de cœur : que l’autorité étatique fasse elle-même le ménage si elle veut prévenir ledit vandalisme. Qu’elle déboulonne elle-même les idoles qui piétinent depuis des siècles l’humanité des Noir.e.s, des Arabes ou des Asiatiques, mais aussi des Juif. ve.s, des Tziganes ou des Arménien. ne.s – comme ce sinistre Pierre Loti, apologue du génocide de 1915, célébré lui aussi par le président Macron, il y a tout juste deux ans. Que la République joue pleinement son rôle de « communauté nationale », et qu’elle offre, en lieu et place de ces icônes outrageantes, de véritables lieux de mémoire apaisants pour tou.te.s les communautés – sauf celle des racistes. Mise au ban de tous les criminels, hommage à toutes les victimes : ce principe égalitaire est la seule politique monumentale légitime et viable à long terme. Sans justice mémorielle, pas de paix pour les statues.