15/12/2020
Pour Laetitia Grail, mathématicienne, les résultats sont «plus que préoccupants» car “la contribution des maths au développement de nos économies modernes est devenue fondamentale“.
L’enquête TIMSS confirme la chute du niveau des élèves français en mathématiques et en sciences. Les résultats vous étonnent-ils ?
Non, on s’enfonce un peu plus à chaque fois. En octobre déjà, l’étude Cedre faisait le même constat, et l’état des lieux était identique en 2014… Nous sommes en chute libre. La France était pourtant très réputée auparavant pour les mathématiques. Aujourd’hui, quand vous demandez à des élèves de CM2 quel est le tiers de 66, moins de la moitié répondent juste, et on ne parle pourtant pas ici de problèmes compliqués à résoudre. […]
D’abord, on a enlevé des pans entiers des mathématiques dans les programmes scolaires et les changements ont été faits à la baisse. On a édulcoré. Avant, il y avait des exercices de seconde qu’on faisait dès le CM2. Le nombre d’heures de mathématiques a aussi fortement baissé ; en trente ans, nous avons perdu 1h30 par semaine. Les élèves ne naissent pas plus bêtes ou moins intelligents qu’avant, mais on ne peut pas en savoir autant en supprimant des heures d’enseignement. […]
En quoi la situation est-elle inquiétante, selon vous ?
Dans tous les pays développés, on retrouve la même situation : la part des emplois directement liés aux mathématiques dans la population active est en constante progression depuis des années. La baisse du niveau est un échec national que nous paierons au prix fort car la contribution des maths au développement de nos économies modernes est devenue fondamentale. Pour faire des ordinateurs, des cartes à puces, de l’intelligence économique, de l’imagerie médicale, de la biostatistique, de la finance, de l’informatique, des télécommunications… il faut des mathématiques. Même le marketing utilise des outils mathématiques pour évaluer sa stratégie. Sans oublier que les mathématiques forment à l’abstraction, et le futur demande beaucoup d’imaginer, de comprendre, d’inventer des concepts. En clair, le monde et les métiers de demain ne se feront pas sans les maths. […]
Que des maîtres et maîtresses aient des profils divers est très intéressant pour les enfants ; mais s’agissant du socle commun, il nous faut des gens qui maîtrisent parfaitement le français et les mathématiques -et qui savent enseigner. […]
Les efforts doivent donc se concentrer sur l’école primaire ?
L’OCDE ne cesse de le répéter dans ses études : l’effort doit porter sur les années de primaire car le système académique ne permet plus ensuite de rattraper ce retard. Beaucoup se rendent compte des difficultés qu’ont leurs enfants en mathématiques en classes de 5e et de 4e, car les notes baissent à ce moment-là̀. […]
08/12/2020
[…] D’après les résultats de l’enquête Trends in International Mathematics and Science Study (Timss), réalisée en mai 2019 sur un échantillon de 4 186 enfants de CM1 et 3 874 adolescents de 4e, la France se classe bonne dernière dans les pays de l’Union européenne, avec des résultats similaires à ceux de la Roumanie. Elle est aussi avant-dernière dans les pays de l’OCDE, devant le Chili.[…]L’effondrement du niveau est spectaculaire, avec un score moyen en baisse de 47 points. A l’époque, les élèves de 5e avaient aussi été évalués, et leur score était inférieur de 46 points à ceux de 4e. Pour le dire autrement, les élèves de 4e d’aujourd’hui sont les 5e d’hier. […]