Nos grandes législations (loi de 1881, celles qui sont venues la compléter) sur les libertés d’expression, les lois comparables dans toutes les démocraties, sont rendues inopérantes dans un environnement médiatique global, dominé par ces mastodontes de l’information, Twitter, Facebook et leurs filiales.
Twitter ne se comporte plus comme un simple tuyau qui ne se soucierait pas de ce qu’il charrie. Avant ces décisions, la liberté sans limites que les géants du net brandissaient, relevait plus d’un cynisme commercial que du militantisme des droits d’expression.
ous la pression de nombreux Etats et d’une partie grandissante de l’opinion inquiète, et s’apercevant aussi -quand-même- des ravages démocratiques des fakenews et de la haine en ligne, Twitter décide de prendre enfin ses responsabilités.
Qu’aurait-on dit si la prise du Capitole avait débouché sur un vrai bain de sang alors qu’un réseau social si puissant avait contribué à répandre les appels à bafouer une élection ? Twitter, Facebook, Instagram, Twitch, Snapchat sont des hébergeurs et pas des éditeurs (au sens juridique)… comme le sont, par exemple les organes de presse, responsables de leur contenu. Mais cette distinction ne tient plus quand la surface de ces réseaux sociaux atteint un tel niveau…
Et par des membres de la majorité comme le ministre du numérique Cédric O. Ce n’est parce qu’une décision nous plait qu’elle est forcément légitime !
Parfois ces critiques sont quand-même cousues de fils bruns ; quand le RN tente de devenir le porte-drapeaux de la liberté d’expression, en estimant que ce sont des opinions que Twitter censure, alors qu’il s’attaquent (en l’occurrence) à de fausses nouvelles rependues par un chef d’Etat, qui a, par ailleurs tout loisir de s’exprimer dans les médias, pour peu qu’il accepte d’être vraiment interviewé et de se voir opposer des arguments.
Pourquoi serait-ce aux Bezos, Zuckerberg et autres Dorsey, patrons d’entreprises dont les dimensions en font le principal espace de débat public planétaire, de déterminer ce qui est publiable ou non publiable ?
Ces réseaux sociaux ne sont pas des services publics. Leurs conditions générales d’utilisation ne sont pas issues de parlements ou de gouvernements légitimes. Le sentiment qui domine est donc ambivalent et paradoxale, comme c’est souvent le cas quand la démocratie doit trouver des armes pour se défendre sans se dévoyer : une mesure d’interdiction arbitraire de la part d’une instance non démocratique se trouve être, en l’occurrence une bonne chose pour la démocratie ! Joli sujet d’examen de philosophie du droit.