Un juge sénégalais a inculpé Ousmane Sonko, principal opposant au pouvoir, dans une affaire de viol présumé. Il a cependant relâché sous contrôle judiciaire cette figure politique dont l’arrestation a provoqué les heurts les plus graves qu’ait connus le pays depuis des années
Son nom a traversé les frontières comme une comète. Jusque-là inconnu outre Sénégal, Ousmane Sonko a fait son entrée sur la grande scène des opposants « anti-système » persécutés par le système même contre lequel ils se battent. Son arrestation pour « trouble à l’ordre public » alors qu’il se rendait au tribunal, mercredi 3 mars, a provoqué une vague de contestations d’une ampleur inattendue pour ce pays d’Afrique de l’Ouest réputé pour sa stabilité.
Ousmane Sonko a été inculpé pour viol dans l’affaire qui lui a coûté son immunité parlementaire, le 26 février dernier. « En cette journée [du droit des femmes, NDLR] du 8 mars, on oublie un peu vite la victime présumée : une jeune femme de 20 ans, masseuse sur laquelle on a vite jeté l’opprobre public en la considérant comme une femme de petite vertu », regrette Caroline Roussy,chercheuse à l’Institut de Relations Internationales et Stratégiques (Iris) et responsable du programme Afrique.
L’opposant de 46 ans ne s’embarrasse pas de telles considérations. Selon lui, cette affaire est un « complot » pour l’évincer de la scène politique, comme l’ont été par le passé l’ancien maire de Dakar Khalifa Sall et le fils de l’ancien président Abdoulaye Wade, Karim Wade. Son arrestation a fait exploser une colère qui sourdait depuis plusieurs mois parmi la jeunesse sénégalaise (majoritaire dans le pays), que les crises sanitaires et économiques ont vivement touchée. Et l’a propulsé en véritable « star » politique.
Ousmane Sonko surfe sur des discours anti-France, anti-franc CFA, anti-corruption et anti-élite. Défenseur de la polygamie (il a deux femmes), il a aussi milité dans sa jeunesse au sein de l’Association des élèves et étudiants musulmans du Sénégal (AEEMS), un mouvement proche des Frères musulmans. Une tâche dans son parcours que ses détracteurs ne manquent pas de lui rappeler.
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La Croix