Ceux qui ont une aversion à l’égard d’un certain nombre de pratiques de l’islam, contrairement à ce qu’ils disent, ce n’est pas au nom de la défense des femmes, des gays, de la laïcité, c’est exactement l’inverse : plus on est hostile à l’islam, plus on est hostile aux femmes, aux gays, etc.
Nonna Mayer, en 2019, dans un interview pour Libération
Xavier-Laurent Salvador, co-fondateur de l’Observatoire du décolonialisme, rappelle que la sociologue a oeuvré à introduire la notion d’islamophobie dans le débat.
Vendredi 12 mars s’est tenu le premier “comité de sélection” de Sciences Po mis en place par le président par intérim de la Fondation nationale de Sciences politiques (FNSP) Louis Schweitzer afin de désigner le successeur du politologue Olivier Duhamel, qui a quitté la présidence en janvier après avoir été accusé par sa belle-fille d’avoir abusé sexuellement du jumeau de cette dernière.
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L’Express : Pourquoi la candidature de Nonna Mayer vous inquiète-t-elle ?
Xavier-Laurent Salvador : Elle ne nous inquiète pas. Elle est révélatrice à notre avis d’un état d’esprit. Nonna Mayer est une sociologue de grand renom. Elle participe depuis 2014 à une réflexion scientifique autour de la notion “d’islamophobie”. Voici de quoi il retourne : en 2015, un rapport de la Commission nationale consultative des droits de l’homme à la rédaction duquel elle a participé propose la définition suivante de l’islamophobie : “une attitude d’hostilité envers les musulmans, les personnes reçues comme telles”. Cette définition vraiment trop extensive reprend les orientations d’un rapport du CCIF (désormais dissous) paru en 2014, et qui précise que sont islamophobes “l’ensemble des actes de discrimination ou de violence contre des institutions ou des individus en raison de leur appartenance, réelle ou supposée, à l’Islam”.
Ne pensez-vous pas que laisser entendre qu’une critique pourrait être “une atteinte contre les musulmans ou assimilés”, c’est confondre une critique de l’islamisme politique (ce qui relève de la liberté d’opinion) avec une attaque contre des croyants ? Ce serait pour le moins discutable dans notre République ! Cette notion de “-phobie” confondrait le plan religieux et le plan humain, conformément à la théologie politique…
Nous pensons que Nonna Mayer est représentative d’une pensée scientifique qui, sous prétexte de catégoriser les individus à travers les enquêtes d’opinion, a ouvert une brèche. Quand on voit ce qui se passe à Sciences po Grenoble, forcément, la nomination de quelqu’un qui a beaucoup oeuvré pour introduire cette notion dans le débat interpelle sur les orientations futures de l’établissement.
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L’Express