La consolidation de Marine Le Pen dans le paysage politique est un fait : son socle électoral apparaît solide, notamment dans les milieux populaires et chez les jeunes actifs. La politique de dédiabolisation qu’elle mène depuis 2011 pour tenter d’élargir son audience fait qu’elle a, en partie, neutralisé les réactions épidermiques que suscitait son père, Jean-Marie Le Pen. A partir du moment où la présidente du RN s’autoproclame « républicaine » et où une partie de ses adversaires la reconnaît comme telle, l’idée du front républicain se trouve automatiquement fissuré.
Le rassemblement des forces de droite et de gauche contre l’extrême droite a connu son apogée en 2002, lors du duel entre Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen. Il s’est, depuis, largement érodé : lors de l’entre-deux tours de l’élection présidentielle de 2017, Laurent Wauquiez, alors président par intérim du parti Les Républicains, n’a pas plus appelé à voter pour Emmanuel Macron que Jean-Luc Mélenchon, le candidat de La France Insoumise. Cette rupture pratiquée par certains leaders a été aussi le fait de nombreux électeurs, qui, par rage ou lassitude, passèrent outre aux consignes de leurs partis. Non seulement le front républicain a perdu de sa valeur morale, mais il a fini par apparaître à beaucoup comme un piège.
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