PÉKIN ne prend plus de gants. De Paris à Anchorage, la Chine communiste lâche désormais ses coups, face aux États-Unis et l’Europe. Par la voix de ses « loups combattants », comme on surnomme ces diplomates guerriers, elle aboie sur ses plus gros partenaires économiques, avec le ton impérieux qu’elle emploie déjà depuis longtemps envers des voisins moins puissants, sûre de son poids et de sa destinée historique. « L’UE n’a pas le droit de faire de leçon à la Chine sur les droits de l’homme. Elle doit méditer sur ses erreurs et les corriger », a tempêté le régime marxiste-léniniste, appelant l’Europe à faire son autocritique comme doit s’y résoudre un simple apparatchik.
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« Il est important pour les États-Unis de cesser d’avancer leur démocratie dans le reste du monde. Beaucoup de gens aux États-Unis ont même peu de confiance dans cette démocratie », a insisté Yang, accusant même l’Amérique de racisme congénital. Cette passe d’armes ouvre une ère de rivalité sans merci au XXI e siècle, effaçant la poignée de main historique de Nixon et Mao en 1972.
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Ces attaques délibérées visent également à assener le coup de grâce à l’ordre international issu de l’après-guerre, fondé sur des valeurs occidentales. Après l’économie, la technologie et le militaire, la Chine passe à l’assaut sur le front idéologique, afin de redessiner les termes de la conversation planétaire.
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Plutôt que de conquérir le monde, la future première économie mondiale veut saper de l’intérieur le système international fondé sur les Lumières, pour faire triompher des relations bilatérales « gagnant-gagnant », où sa masse critique lui assurera une prépondérance, retrouvant sa place historique d’empire du Milieu.
Face à des démocraties minées par des crises de confiance, le régime communiste mise sur les périphéries émergentes, le long de sa nouvelle « route de la soie », jusqu’en Afrique et en Amérique latine, pour encercler l’Occident tétanisé. En narguant Washington ou Bruxelles devant les caméras, Pékin fait des oeillades de grand frère aux pays neufs, fatigués des leçons des anciens maîtres coloniaux, (…).
Mais ce langage outrancier trahit aussi l’anxiété d’un parti unique, toujours hanté par la chute de l’URSS, et rattrapé par le spectre de l’encerclement.