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Parce que Napoléon fut le fossoyeur des idéaux d’émancipation de la Révolution française, qu’il a mis l’Europe à feu et à sang et rétabli l’esclavage, l’essayiste Louis-Georges Tin [et président du Conseil représentatif des associations noires de France de 2011 à 2018] et le politiste Olivier Le Cour Grandmaison proposent, dans une tribune au «Monde», de transformer son mausolée en musée de l’histoire des Républiques.

Longtemps, Napoléon (1769-1821) a été encensé et glorifié sans complexe, par toute une tradition relevant plus de l’hagiographie que de l’histoire véritable. Or Napoléon pose au moins trois problèmes majeurs : tout d’abord, il s’est imposé par un coup d’Etat, le 18 brumaire, en détruisant la République pour la remplacer par l’Empire. Il fut ainsi le fossoyeur des idéaux d’émancipation de la Révolution française et des déclarations des droits de l’homme et du citoyen.

Ensuite, il a mis l’Europe à feu et à sang. Aujourd’hui encore, du Royaume-Uni à la Russie, la mémoire collective est marquée par le souvenir de cette histoire ; en Espagne, Goya a peint El Tres de mayo, tableau qui montre la violence et les ténèbres associées à l’Empereur.

Enfin, c’est essentiel, en 1802 Napoléon a rétabli l’esclavage aboli par la Convention en 1794. Exception française trop souvent méconnue, la France est de fait le seul pays au monde à avoir rétabli l’esclavage, ce crime de lèse-humanité, comme on le disait déjà au XVIIIe siècle.

[…] Comment peut-on célébrer un homme qui fut l’ennemi de la République française, de nombre de peuples européens, et l’ennemi de l’humanité enfin puisqu’il fut esclavagiste ?

La réponse est claire : enseigner l’histoire de ce personnage, oui ; le célébrer, non. Or, en général, concernant Napoléon, on fait l’inverse : on le célèbre beaucoup et on l’enseigne assez peu. Il a fallu les efforts d’une historiographie nouvelle pour que, depuis quelques décennies, toute la lumière soit faite sur ses exactions et sur ses crimes.

Que l’on marque, d’une façon ou d’une autre, le bicentenaire de sa mort, soit. Mais va-t-on profiter de cette occasion pour faire l’apologie d’un homme qui a commis des crimes politiques, des crimes de guerre et un crime contre l’humanité ? […]

Le Monde

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