La “Charte des principes pour l’islam de France” a été signée le 18 janvier 2021. Ghaleb Bencheikh, président franco-algérien de la Fondation de l’Islam de France, parle d’une singularité injuste, mais nécessaire. À l’heure où des musulmans de France et du monde contestent cette signature, l’islamologue se veut optimiste. Il rappelle cependant que cet islam contemporain doit clarifier sa vision sur les libertés (de conscience, d’expression, d’opinion ) et sur l’apostasie…
L’islam est-il compatible avec la République ?
La question ne se pose pas. C’est comme si l’on se demandait si le judaïsme, le christianisme ou la franc-maçonnerie étaient compatibles avec la République. Certes, on entend souvent la question un peu partout. Mais en réalité, la tradition religieuse islamique fait partie du même corpus que le monothéisme abrahamique, judé-islamo-chrétien. S’il n’y a pas de problèmes avec le judaïsme ou le christianisme, il n’y a aucune raison qu’il y en ait avec l’islam. Maintenant, le comportement, l’idéologie et la vision de certains musulmans ou ce qu’on appelle l’islamisme radical ou l’islamisme politique posent problème. Il incombe aux musulmans eux-mêmes d’aplanir cette difficulté et de la régler. […]
Est-il compatible avec le concept de “valeurs républicaines” ?
De nos jours, en France avec cet islam contemporain, il faut clamer haut et fort que les libertés fondamentales, comme la liberté de conscience, la liberté d’expression, la liberté d’opinion, doivent être garanties et assurées, et que la criminalisation de l’apostasie est criminelle.
La liberté de conscience est fondamentale. Cela ne pose pas de problèmes au niveau du Coran, et s’il y a telle ou telle interprétation à travers l’histoire qui criminalise l’apostasie comme une haute trahison, comme une traîtrise, il est temps que celle-ci soit révolue et que l’on s’attache à la liberté de conscience. Il en va de même des interprétations, y compris dans le Coran, à propos de l’héritage et de la dévolution successorale. […]
On parle aussi de plus en plus d’islamophobie en France…
La haine contre les musulmans est inacceptable. Il n’y a pas délibérément de misislamie d’État à mon sens. En revanche, sur les plateaux télé, on assiste à une zemmourisation des esprits. Il y a un triomphe idéologique, notamment d’extrême droite où des conservateurs antimusulmans sévissent dans les colonnes de certains journaux ou sur des canaux satellitaires qui affichent leur détestation des musulmans. […]