L’Association des maires de France (AMF), aussitôt suivie par les autres associations du bloc local, tirent l’alarme : le nombre de constructions de logements sociaux est en baisse en France. En cause, notamment : une fiscalité locale (TFPB, TH) de plus en plus défavorable aux collectivités. Explications.
87 500 logements sociaux agréés en 2020, contre un objectif affiché de 110 000. Certes, les élections municipales et la crise sanitaire sont passées par là. Mais dès 2019, l’infléchissement s’est fait ressentir : 105 000 logements agréés. Il faut remonter à 2005 pour retrouver des chiffres aussi bas, alerte Thierry Repentin, maire (PS) de Chambéry et co-président du groupe de travail de l’AMF « Logement-habitat-hébergement ». « Lorsqu’une équipe municipale souhaite engager la construction de logements sociaux, elle sait qu’elle ne bénéficiera d’aucune ressource fiscale supplémentaire pour bâtir les équipements publics nécessaires à l’accueil de nouvelles populations », s’inquiète également Philippe Laurent, secrétaire général de l’AMF. (…)
Face à la situation actuelle laissant apparaître un déficit de logement sociaux, les associations nationales d’élus locaux appellent l’État à revoir ses ambitions en matière de soutien aux politiques du logement.
En effet, le resserrement continu des ressources locales remet en cause les politiques publiques et plus particulièrement le développement du logement social : l’Etat compense moins de la moitié des allégements fiscaux qu’il impose. Pour les allègements de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) applicables au logements sociaux la compensation descend à 12% soit 86M€ de compensation sur un total d’exonération de 714M€ en 2019.
L’un des effets collatéraux de la réforme de la TH est la pénalisation fiscale de la construction de logements sociaux nouveaux.
Les associations souhaitent donc la mise en place d’un modèle économique ambitieux de relance de la construction de logements, en cohérence avec la politique de lutte contre l’artificialisation des sols portée par le gouvernement, mais s’appuyant sur l’exercice décentralisé des compétences en matière d’habitat qui relèvent du bloc communal.
A cet égard, la multiplication d’appels à projet circonscrits en montant d’aides financières et d’objectifs fléchés essentiellement sur la relance ne doit pas être la seule réponse en terme d’accompagnement par l’Etat, sur le long terme, des communes et intercommunalités en matière de construction de logements sociaux.
Pour répondre à cet enjeu, l’ensemble des associations d’élus formule les propositions suivantes :
- Déléguer plus largement les aides de l’Etat en matière de logement (aides à la pierre, zonage des politiques fiscales, aides à la rénovation énergétique des logements etc.) afin de permettre aux élus du bloc communal de véritablement prendre en main la programmation de la construction de logements de toute typologie selon les besoins réels de leurs administrés (social, intermédiaire, en accession) et les contraintes foncières locales rencontrées ;
- Augmenter le soutien financier aux communes souhaitant récupérer du foncier pour lancer des opérations de construction via des fonds de solidarité suffisamment dotés pour répondre aux enjeux locaux ;
- Mettre à disposition des collectivités locales à titre gracieux le foncier de l’Etat et de ses satellites (SNCF, VNF, RATP, hôpitaux, emprises militaires, etc) pour construire du logement abordable, conformément aux dispositions la loi Duflot du 18 janvier 2013 ;
- Compenser justement les réductions de recettes imposées par l’Etat, indispensable au financement du logement social ;
- Relever la compensation de tous les allègements de TFPB applicables aux logements sociaux;
- Elargir de nouvelles mesures de défiscalisation en faveur de la rénovation du bâti ancien.
Plus généralement, les associations nationales d’élus estiment que la réforme de la taxe d’habitation réduit encore les ressources locales ; elle a cassé le lien fiscal de toute une catégorie de population avec leur commune. Le produit de l’impôt est pourtant indispensable au financement des services à la population et des équipements publics. La tarification généralisée des prestations locales ne peut être une solution de remplacement en raison notamment du coût très élevé qui pèserait sur les usagers. Le financement par l’impôt permet l’équité en répartissant les charges sur l’ensemble de la population en fonction de leur capacité contributive.
Face au ralentissement de la construction, le relèvement de la compensation de tous les allègements de TFPB applicables aux logements sociaux est une nécessité. L’État doit ainsi compenser les mesures d’allègements qu’il décide selon le principe « qui décide paie ».