13/08/2021
Saisi par des parlementaires de gauche comme de droite, le Conseil constitutionnel a rendu vendredi une décision très attendue sur la loi confortant le respect des principes républicains. Adopté en juillet ce texte avait suscité d’âpres débats entre majorité et oppositions.
La décision du Conseil constitutionnel sur cette loi contestée est tombée, vendredi 13 août. Saisis par des parlementaires de gauche comme de droite, les Sages valident l’essentiel des sept articles sur lesquels ils ont été saisis mais censurent certaines dispositions.
Les associations
Le Conseil constitutionnel était amené à se prononcer sur le respect des libertés fondamentales d’association. Les Sages ont censuré la disposition permettant au ministre de l’Intérieur de prononcer la suspension des activités d’une association, dont il n’est pas établi qu’elle trouble gravement l’ordre public, en cas d’urgence.
Retrait du titre de séjour (Article 26)
En outre, le Conseil constitutionnel a censuré une disposition prévoyant le refus de délivrance du titre de séjour ou son retrait pour « rejet des principes de la République ». Les Sages jugent les critères trop imprécis pour déterminer quels comportements pourraient caractériser un tel rejet.
Pour le président du groupe LR, Bruno Retailleau, « cette décision est plus politique que juridique ». Le sénateur de Vendée y voit « une nouvelle démonstration que seul un référendum permettra de réformer vraiment les règles qui régissent l’immigration en France ».
[…]Le Conseil constitutionnel sur l’article 26 :
L’article 26 modifie plusieurs articles du livre IV du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile afin de subordonner le séjour d’un étranger en France à l’absence de manifestation d’un rejet des principes de la République.
Les députés auteurs de la deuxième saisine considèrent que, au regard de l’imprécision de l’expression « principes de la République » et de l’absence de critères permettant de caractériser la manifestation d’un rejet de ces principes, ces dispositions méconnaîtraient le principe de clarté de la loi et l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi. Ils font valoir également que ces dispositions, de par leur caractère équivoque, ne préviendraient pas « le risque de décisions administratives ou juridictionnelles arbitraires » et méconnaîtraient, de ce fait, la liberté d’aller et venir, la liberté individuelle et le droit à une vie de famille normale.
Aucun principe non plus qu’aucune règle de valeur constitutionnelle n’assure aux étrangers des droits de caractère général et absolu d’accès et de séjour sur le territoire national. Les conditions de leur entrée et de leur séjour peuvent être restreintes par des mesures de police administrative conférant à l’autorité publique des pouvoirs étendus et reposant sur des règles spécifiques. Le législateur peut ainsi mettre en œuvre les objectifs d’intérêt général qu’il s’assigne. Dans ce cadre juridique, les étrangers se trouvent placés dans une situation différente de celle des nationaux.
Toutefois, si le législateur peut prendre à l’égard des étrangers des dispositions spécifiques, il lui appartient de respecter les libertés et droits fondamentaux de valeur constitutionnelle reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République. S’ils doivent être conciliés avec la sauvegarde de l’ordre public qui constitue un objectif de valeur constitutionnelle, figurent, parmi ces droits et libertés, notamment la liberté d’aller et venir et le droit de mener une vie familiale normale.
L’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, impose au législateur d’adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques. Il doit en effet prémunir les sujets de droit contre une interprétation contraire à la Constitution ou contre le risque d’arbitraire, sans reporter sur des autorités administratives ou juridictionnelles le soin de fixer des règles dont la détermination n’a été confiée par la Constitution qu’à la loi.
Les dispositions contestées prévoient que la délivrance ou le renouvellement de tout titre de séjour peut être refusé à un étranger s’il est établi qu’il a manifesté un rejet des principes de la République. Ce même motif peut également fonder le retrait d’un titre de séjour.
Toutefois, s’il est loisible au législateur de prévoir des mesures de police administrative à cette fin, il n’a pas, en faisant référence aux « principes de la République », sans autre précision, et en se bornant à exiger que la personne étrangère ait « manifesté un rejet » de ces principes, adopté des dispositions permettant de déterminer avec suffisamment de précision les comportements justifiant le refus de délivrance ou de renouvellement d’un titre de séjour ou le retrait d’un tel titre.
Dès lors, les dispositions contestées méconnaissent l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi. Par conséquent, et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres griefs, l’article 26 est contraire à la Constitution.
Conseil constitutionnel
Public Senat / Conseil Constitutionnel
23/07/2021
Le Parlement a mis un point final vendredi 23 juillet au projet de loi controversé de lutte contre le séparatisme, adopté définitivement via un ultime vote de l’Assemblée et vivement critiqué par la gauche comme la droite. Après sept mois d’allers et retours entre Palais Bourbon et Sénat, le texte «Respect des principes de la République», présenté comme un remède à «l’OPA islamiste», a été validé par les députés par 49 voix pour, 19 contre et 5 abstentions.
[…]Dans un baroud d’honneur, Jean-Luc Mélenchon a défendu en vain une dernière motion de rejet préalable contre une «loi antirépublicaine» à «vocation anti-musulmane» selon lui. Mais le texte est «de portée générale» et «ne traite pas des rapports avec une seule religion», a assuré le président de la commission spéciale François de Rugy (LREM).
Porté par le ministre Gérald Darmanin, il contient une batterie de mesures sur la neutralité du service public, la lutte contre la haine en ligne, la protection des fonctionnaires et des enseignants, l’encadrement de l’instruction en famille, le contrôle renforcé des associations, une meilleure transparence des cultes et de leur financement, et encore la lutte contre les certificats de virginité, la polygamie ou les mariages forcés.
[…]Le projet de loi a cependant fait l’objet de vives attaques de la part de certains dirigeants et mouvements islamistes à travers le monde, en particulier la Turquie de Recep Tayyip Erdogan, provoquant au milieu d’autres frictions géopolitiques des mois de tensions entre Paris et Ankara.
Groupe Les Républicains
Contre :
- Anne-Laure Blin
- Sandra Boëlle
- Bernard Bouley
- Mansour Kamardine
- Marc Le Fur