Depuis mai dernier, le colonel Emmanuel Combe, 45 ans, commande le 2e régiment étranger de génie de Saint-Christol. Un millier de légionnaires d’une centaine de nationalités. Il répond à nos questions.
Quand des élus ou des candidats à la Présidentielle évoquent l’envoi de l’armée pour sécuriser les cités gangrenées par les trafics de drogue et l’insécurité, est-ce réaliste ?
« Je pense qu’on ne sait pas bien ce qu’est le travail de l’armée. Je ne fais en aucun cas partie des forces de l’ordre, je n’ai pas d’officier de police judiciaire chez moi, et jusqu’à preuve du contraire, il n’y a pas de guerre civile en France. Notre intervention est toujours dans le cadre de l’antiterrorisme. Que notre présence puisse faire baisser la petite délinquance justement parce qu’on est présent ou que ça puisse rassurer les gens, très bien. Mais ce sont des effets de bord. Ce n’est pas du tout notre mission principale. Notre mission principale est d’être capable de lutter contre la menace terroriste. Il ne faut pas se tromper. Ce qui est inquiétant, c’est qu’on voudrait faire porter sur l’armée l’échec de ce qu’on aurait dû faire avec d’autres moyens. Si vous avez besoin de détruire un immeuble pendant une guerre, je peux le détruire, mais sinon je ne suis pas convaincu que ça s’inscrive vraiment dans la volonté de la population. »
Mais si on vous donne l’ordre de le faire, d’investir des cités ?
« Non. Non, car ce n’est pas mon métier, et que c’est un ordre illégal, et j’ai interdiction d’obéir à un ordre illégal. Le jour, où un immeuble sera tenu entièrement par des terroristes de Daesh, la question ne se posera pas. La question qui se posera sera celle de savoir quels sont les civils qui sont à l’intérieur, et pourquoi le Raid ou le GIGN ne peut pas prendre en compte la mission. Attention, on est sur le territoire national. Mon problème est aux frontières, et quand la menace terroriste s’infiltre, la notion de frontières est alors ramenée à l’intérieur du pays. »