Pour une majorité de Français, le scénario d’une victoire de Marine Le Pen n’a plus rien d’impossible. En l’état, au second tour, ils seraient désormais plus nombreux à se déplacer pour faire barrage à Emmanuel Macron, plutôt qu’à la candidate d’extrême droite. Un basculement.
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Reports de voix « catastrophiques » pour Macron
Depuis des mois, au Rassemblement national, on considère que le candidat qui l’emportera sera celui, ou celle, qui suscitera « le moins de rejet ». Les mêmes ont aussi analysé dès la rentrée 2021, que la candidate d’extrême droite, si elle se qualifie, arriverait au second tour en position nettement plus favorable qu’en 2017, grâce, notamment, à la réserve de voix constituée par l’électorat zemmouriste. L’analyse des reports de voix entre le premier et le second tour confirme cette tendance : les électeurs Zemmour voteraient bien Marine Le Pen comme un seul homme (72 % pour Marine Le Pen contre 9 % en faveur d’Emmanuel Macron et 19 % d’abstention).
Ailleurs, les reports de voix sont aussi « catastrophiques » pour le président sortant, notamment à gauche. A peine un électeur « insoumis » sur trois (35 %) – parmi ceux certains de voter le 24 avril – a l’intention de choisir un bulletin Emmanuel Macron. Les « insoumis » seraient 22 % à lui préférer Marine Le Pen au second tour et 43 % à s’abstenir. Les électeurs de Yannick Jadot et d’Anne Hidalgo sont eux aussi très tentés par l’abstention en cas de duel Macron/Le Pen, et un sur deux pensent choisir Macron. A droite, c’est encore pire : seulement 42 % des électeurs de Valérie Pécresse s’apprêtent à voter Macron. Un tiers d’entre eux pourraient s’abstenir et 24 % indiquent préférer voter Marine Le Pen – soit une voix sur quatre d’un électorat déjà largement siphonné par Eric Zemmour. Odoxa résume : “« Il y a cinq ans, le “front républicain” avait déjà pris du plomb dans l’aile par rapport à 2022, mais il existait encore. Désormais il est mort. »”
Autre basculement : les Français qui voteront pour faire barrage à l’une ou l’autre sont désormais plus nombreux à vouloir faire barrage à Emmanuel Macron (19 %) qu’à Marine Le Pen (18 %). Un point d’écart symbolique. Mais c’était l’inverse en mars quand 18 % des Français annonçaient vouloir voter pour empêcher Emmanuel Macron contre 22 % voulant faire barrage à Marine Le Pen – qui confirme le net recul de sa diabolisation dans l’opinion. La campagne avant le second tour, les attaques en crédibilité ou en poutinophilie des macronistes, ou encore le débat d’entre-deux-tours, pourront-ils inverser cette tendance ?
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