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En ce jour de mai, Karfa Diallo inaugure son cinquième parcours mémoriel en France. Depuis 2012, il a dupliqué ses « pèlerinages » à Bordeaux, Le Havre, La Rochelle, Bayonne. A Paris, la visite débute au pied de la statue de Thomas Jefferson, qui donne sur la passerelle Léopold-Sédar-Senghor et la promenade Edouard-Glissant, et s’achève deux heures plus tard devant la sculpture du général de Gaulle, sur l’avenue des Champs-Elysées. « C’est scandaleux que Paris, capitale de l’empire esclavagiste français, ne s’intéresse pas aux traces de cette histoire alors qu’elle est incrustée dans sa chair. C’est dans cette ville qu’a été organisé pendant des siècles ce crime contre l’humanité. Et ces traces sont toujours là », explique le fondateur de l’association Mémoires & Partages.
Karfa Diallo, 51 ans, lunettes rondes et éternel fédora sur la tête, se dit en « mission » depuis son arrivée à Bordeaux, il y a vingt-sept ans. Inscrit à Sciences Po, ce fils de Thiaroye, banlieue populaire de Dakar, décrit une « colère ». « J’enrageais car le premier port colonial français, qui a prospéré sur ce commerce ignoble, n’affichait aucun hommage à ceux qu’il a exploités », explique-t-il à une terrasse de café, place de la Victoire.

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Mais à Bordeaux, nombreux sont ceux qui émettent de vives critiques contre le militant. Certains doutent de sa sincérité et l’accusent de faire de la mémoire un fonds de commerce. « Il a bâti sa carrière sur le sentiment de culpabilité ressenti par certains Blancs vis-à-vis de cette histoire », dénonce Rafael Lucas, militant associatif de longue date au sein du Comité Toussaint-Louverture et chercheur à l’université de Bordeaux : « Il est illégitime. A-t-il déjà écrit un article scientifique ? Il est dans l’émotion, loin de l’information et des faits, et invisibilise le travail d’autres acteurs associatifs. »

Karfa Diallo préfère exhiber les avancées obtenues grâce à son militantisme, comme l’installation en 2006 sur le quai des Chartrons d’une première plaque en mémoire des Africains déportés et l’ouverture de quatre salles consacrées à l’histoire de la traite et de l’esclavage au sein du musée d’Aquitaine. Sa plus grande victoire reste l’installation de plaques explicatives dans cinq rues portant des noms de négriers. La mention que la traite et l’esclavage constituent un crime contre l’humanité y sera bientôt ajoutée.

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Karfa Diallo se sent seul dans son combat. Sa famille sénégalaise – il est l’aîné d’une fratrie de 25 enfants – goûte peu ce militantisme forcené. « Me battre contre des gens puissants a longtemps été incompréhensible pour mes proches. C’était pour eux un luxe qu’un fils de pauvres ne pouvait se permettre. Cela m’a rendu malade », confie-t-il. En France, il se retrouve peu dans les mouvements antiracistes actuels : « Leur vision européocentrée me dérange car elle ne questionne pas la traite arabo-musulmane et ses conséquences actuelles. L’antiracisme doit pousser les diasporas maghrébines en France à faire ce travail de mémoire. »

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Le Monde

Merci à Blaireau Bondissant d’indiquer un mail de contact.


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