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« Le RN s’institutionnalise à vitesse grand V. Leur stratégie est très intelligente. Ils avancent à bas bruit, comme ils le font depuis plusieurs années, passent sous les radars médiatiques, mais s’imposent comme le principal groupe d’opposition », s’inquiète une figure de la majorité présidentielle. « La Nupes signe son acte de décès en pavant la voie de l’Élysée au RN. Ils ne peuvent pas leur faire de plus beau cadeau que de les traiter de fachos ou de nazis ! Ça ne marche plus depuis un bon moment auprès des Français », s’emporte un député macroniste.
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Une quête de notabilité qui inquiète les poids lourds de la macronie, alors que le parti de Marine Le Pen a progressé de presque 1,3 million de voix au premier tour des législatives en cinq ans. Il y a quelques jours, Bruno Le Maire, qui travaille assidûment ses réseaux parlementaires, a réuni à déjeuner une douzaine de députés macronistes à Bercy. Le ministre de l’Économie leur a passé la consigne suivante, impérative : pas question de tomber dans le piège de la respectabilité tendu par le Rassemblement national. « Tout accord, même implicite, avec le RN est létal ! » les a alertés le numéro deux du gouvernement, chirurgical.
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« On ne fait pas copain-copain avec les députés LREM, mais on s’entend plutôt bien avec eux. On a à peu près le même âge et on travaille en bonne intelligence en commission », assure néanmoins un jeune député RN. « Nous renvoyer dos à dos avec les Insoumis ne peut pas être efficace dès lors qu’un des deux groupes considère que l’hémicycle est une assemblée générale de l’Unef [Union nationale des étudiants de France, NDLR]. Eux ne sont pas là pour travailler mais pour hurler pendant cinq ans. La position de la majorité n’est pas tenable », poursuit le même.
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Loin de l’agitation du Palais-Bourbon, au QG du RN porte de Saint-Cloud (Paris), on aimerait penser que le RN sera, dans quelques années, l’unique parti de la droite. « Emmanuel Macron a épuisé ses marges de manoeuvre politiques et financières et le RN est la seule alternative », veut croire Philippe Olivier, conseiller spécial de Marine Le Pen. « Prenons le temps de regarder l’état des oppositions. Nous sommes le seul parti en dynamique. Les Républicains coulent et Laurent Wauquiez ne sauvera pas le navire. La gauche est en reflux idéologique et électoral. Jean-Luc Mélenchon, déjà à la retraite, est voué à réapparaître comme une ombre tutélaire », juge un cadre. « Toutes les portes s’ouvrent à nous, à condition qu’on reste sages », résume un pilier du parti. À condition, aussi, d’écarter les autres potentiels successeurs du chef de l’État…