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En prévision du futur mondial de foot, deux journalistes de l’hebdomadaire « le Point » sont allés à Doha pour interviewer l’Émir du Qatar, le Cheikh Tamim ben Hamad Al Thani. Résultat du match : Qatar : 5 – Journalisme : 0.

Dans sa dernière livraison, le Point annonce en couverture une interview fleuve du Cheikh Tamim ben Hamad Al Thani, émir du Qatar, avec photo de l’impétrant à l’appui. Pour cet exercice, l’hebdomadaire a délégué dans le pays hôte du Mondial de foot son directeur de la rédaction, Étienne Gernelle et Luc de Barochez, deux attaquants réputés de la maison, célèbres pour leur capacité à se jouer des défenses adverses. On s’attendait donc à voir l’Émir cerné, poussé dans ses retranchements, mis face à ses contradictions, sommé de s’expliquer, ne serait-ce que pour permettre à Étienne Gernelle de retrouver un minimum de crédibilité après l’affaire des fausses accusations contre le couple Garrido-Corbière.

(…) L’Émir enfile les formules creuses comme d’autres enfilent les perles sans que jamais le duo d’intervieweurs ne daigne rompre l’atmosphère de complicité bienveillante qui sied à ce genre d’exercice, qui est au journalisme ce que le Qatar est aux droits des femmes.

(…) L’Émir tient même à préciser, en réponse à une question sur la liberté d’expression servie sur un plateau comme un verre de thé : « Chacun a le droit de s’exprimer mais, quoi que nous disions, nous devons éviter de blesser des gens issus de cultures, de religions ou de milieux différents. » Vous voyez ce qu’il veut dire ? Moi aussi, mais pas le duo du Point, qui se garde bien de titiller l’interlocuteur de Doha sur le sujet. Dès lors que l’islam est « une religion de paix », comme il dit, pas question de lui chercher querelle.

SALMAN RUSHDIE, CONNAIS PAS

D’ailleurs, quand il est interrogé sur la tentative d’assassinat de Salman Rushdie, après moult circonvolutions verbales, que fait l’Émir ? Il se lance dans des généralités mais ne daigne même pas citer le nom de l’écrivain condamné à mort pour avoir blasphémé contre la célèbre « religion de paix ». Il préfère enfoncer des portes ouvertes et préciser au passage qu’il faut se méfier non des Frères Musulmans, qui sont au Qatar comme des supporters d’un club de foot dans un stade, mais de ceux « qui exploitent l’islamophobie ». Avis aux amateurs.

(…) Marianne

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