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Après #MeToo, Paul et Sébastien entreprennent un parcours de “déconstruction” pour démanteler leurs réflexes patriarcaux. Le premier change radicalement de sexualité jusqu’à y renoncer. Le second met ses 30 ans d’expérience dans la pub pour conquérir le marché du féminisme.

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Malgré le fait qu’il a conscience de l’inégale répartition des tâches au sein de son couple, Paul, 25 ans, ne parvient pas à atteindre une répartition égalitaire avec sa copine, avec laquelle il vit depuis 3 ans.

“Comment se fait-il que, moi, un jeune adulte de 25 ans parfaitement autonome, indépendant financièrement, mature, stable, soit incapable d’anticiper ce qu’il va se cuisiner le soir en rentrant ? Il y a des forces transcendantes que je ne comprends pas qui font que je passe à côté du linge sec. Ce n’est pas que je prends la décision de ne pas le plier puisque j’ai la flemme et qu’elle va s’en occuper, c’est que je ne vois même pas qu’il y a du linge sec.” Paul

Dans sa famille, la mère de Paul était celle qui prenait en charge l’essentiel des tâches ménagères, et sa sœur était davantage sollicitée pour y participer que lui quand il était enfant. Arrivé au collège, Paul constate une intensification des insultes misogynes ou homophobes, et de la violence physique. “C’est à partir de cet âge-là, 12-13 ans, que j’ai senti un décalage entre moi et les garçons.”

À l’été 2018, Paul fréquente une femme qui pratique le BDSM*. “#MeToo non seulement a été bénéfique pour nous deux puisqu’on a pris plus de plaisir, mais a également permis de simplifier nos rapports. Je savais ce qu’elle ne voulait pas et elle savait ce que je ne voulais pas. Ça a libéré sa parole et ses pratiques, mais également les miennes.”

Puis, en école de commerce, il rencontre sa future copine. Lorsqu’ils emménagent ensemble, leur vie sexuelle s’estompe. “On se fait beaucoup de câlins et de bisous au cours de la journée, et j’ai la sensation que ça se substitue, au moins partiellement, aux rapports sexuels qu’on n’a plus et qu’on compense affectueusement. Je ne l’attire plus sexuellement et elle ne m’attire plus sexuellement.”

“Une conséquence directe de #MeToo est que je suis dans une perspective de déconstruction où je n’apprécie pas le fait d’être un homme. Je n’ai pas forcément envie d’être une femme, mais ce qu’il y a de masculin en moi, au sens toxique du terme, j’ai envie de le supprimer.” Paul

Au moment du débat sur le mariage pour tous, Sébastien, 54 ans, s’engage en manifestant aux côtés d’amis gays. S’ensuivra l’émergence de questionnements sur le féminisme, grâce à sa femme.

“Je suis un homme, je suis hétéro, je suis blanc, je suis bourgeois, donc je représente la classe dans laquelle se retrouvent toutes les mécaniques d’oppression.” Sébastien

Le mouvement #MeToo marque une nouvelle étape dans les réflexions sur le sexisme chez Sébastien. “J’avais tendance à sexualiser très facilement mes relations avec les femmes, c’est-à-dire que je ne pouvais pas aborder une femme sans évaluer son potentiel sexuel.”

“Quand je croise une femme dans la rue, si je la trouve attirante, c’est comme ça. J’ai appris à décorréler mon comportement de cette évaluation. Et je sais aujourd’hui que je ne suis pas le seul, que j’interviens au milieu d’une meute d’autres mecs qui la regardent. Et surtout, il y a d’autres hommes qui vont voir ce regard qui signale qu’il y a une proie potentielle.” Sébastien

Sébastien se lance dans l’écriture d’un livre destiné aux hommes comme lui, pour les encourager à la “déconstruction”. “On me fait beaucoup de reproches de prendre la parole et de piquer la voix des femmes.”

“Si on a une réflexion en termes de marché, je ne leur pique pas des parts de marché puisque je parle aux hommes et qu’elles ne parlent pas aux hommes. Au contraire, je crée un nouveau marché, je crée une nouvelle audience d’hommes qui ont envie qu’on leur explique des trucs et qui n’ont jusqu’à présent pas trouvé les bonnes sources d’information.” Sébastien

“Nous, les hommes, par l’éducation, par les rapports qu’on a avec les gens, par la culture, par le cinéma, par la littérature, on a été construit dans une identité, dans des comportements qu’on attend de nous. Donc se déconstruire, c’est exactement ce qu’on a à faire.” Sébastien

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