C’est une dame blanche bien connue du 5 e arrondissement de Paris. Minaret discret, patio idyllique : la grande mosquée de Paris fête ses 100 ans. Pour l’occasion, le président de la République vient remettre ce mercredi les insignes d’officier de la Légion d’honneur à son recteur, Chems-Eddine Hafiz. Emmanuel Macron rendra également hommage aux musulmans morts pour la France lors de la Première Guerre mondiale. C’est pour ces 70 000 combattants que cet édifice religieux fut construit. À vrai dire, la vieille dame avance de quelques années sa date anniversaire. Car, si les premières pierres ont été posées en 1922, la véritable inauguration remonte à 1926. Un avancement de calendrier qui obéit, selon certains, à un « agenda politique » au moment où les relations se tendent entre la France et l’Algérie. La Grande Mosquée a toujours été un espace symbolique de diplomatie parallèle, même si cette institution revendique son « autonomie » vis-à-vis d’Alger.
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Plusieurs sources concordantes assurent que, après l’hommage rendu par Emmanuel Macron aux combattants de la guerre d’Algérie, ce mardi aux Invalides, le chef de l’État va consacrer son intervention de mercredi à la laïcité républicaine. En écho à son discours fondateur des Mureaux, le 2 octobre 2020, où il avait déclaré : « Le problème, c’est le séparatisme islamiste. » Et annoncé « la loi confortant les principes de la République », dite « contre le séparatisme », adoptée le 24 août 2021. Un thème sur lequel le président est attendu au tournant. Objectivement, aucun gouvernement n’avait pris des mesures aussi contraignantes contre l’extrémisme religieux. Mais l’application de cette loi – et non son objectif – fait l’unanimité contre elle. Et pas seulement dans les mosquées, où les démarches administratives et bancaires sont devenues de véritables casse-tête, selon plusieurs responsables. Les communautés chrétiennes sont impactées. Ensemble, catholiques et protestants ont attaqué la loi au Conseil d’État, l’accusant de mettre en péril la liberté religieuse mais aussi d’enseignement.
Un autre dossier mécontente fortement les musulmans. Avec Chems-Eddine Hafiz, Emmanuel Macron s’est employé à déstructurer le CFCM, qui représentait officiellement l’islam de France. La nouvelle structure de gestion de ce culte, le Forum de l’islam de France (Forif), lancée en février 2022 par le ministère de l’Intérieur, fait du sur-place. « Nous voilà enfermés », confie un responsable national musulman expérimenté. Un autre, de même niveau, déplore : « Pendant ce temps, les extrémistes gagnent du terrain . »